Pendant ce temps, le gouvernement
de Tours ou plutôt l'un de ses membres, M. Crémieux,
élaborait de nombreux décrets destinés à réorganiser et
à transformer l'Algérie. M. Crémieux avait fait plusieurs
voyages en Algérie; il y avait plaidé et même gagné
plusieurs procès; il croyait très bien connaître le pays.
Ce qui est incontestable, c'est son dévouement ardent,
passionné aux intérêts algériens et les intentions
excellentes dont il était animé. Ses collègues, assaillis
de préoccupations de toutes sortes, s'en remirent
complètement à lui de tout ce qui concernait l'Algérie; il
fut le seul auteur des décrets d'octobre et en revendiqua
d'ailleurs l'entière responsabilité. Il ne consulta
personne, à ce qu'il semble, et ne prit même pas l'avis des
préfets. Il donna audience à une délégation algérienne,
mais ne tint pas grand compte des observations qu'elle lui
présenta. Gambetta lui écrivit pour lui demander de se
hâter : " Mon cher maître, lui disait-il, je vous prie
de faire insérer immédiatement au Moniteur les
décrets relatifs à l'Algérie. Il est impossible de
prolonger plus longtemps l'attente des délégués de
l'Algérie. "
Le programme de Crémieux était fort simple, du moins en
apparence et tenait en peu de mots. " Détruire le
détestable régime militaire, fléau de notre riche colonie
et y substituer le gouvernement civil, assimiler en un mot
complètement l'Algérie à la France, " tel était le
but qu'il se proposait. Pendant les cinq mois qu'il fut au
pouvoir, il ne prit pas moins de cinquante-huit décrets
concernant toutes les branches de l'administration
algérienne; quelques-uns de ces décrets ne furent d'ailleurs
jamais appliqués, d'autres furent rapidement abrogés.
Le décret du 24 octobre 1870 bouleversa tout ce qui
touchait au gouvernement de l'Algérie. Le gouverneur, le
sous-gouverneur, le secrétaire général, le conseil
supérieur, le conseil de gouvernement furent supprimés :
" L'Algérie, disait le décret, renferme 3
départements, ce qui établit 92 départements dans la
République française. " |