une bienveillance sincère et la
plus charmante hospitalité.
Nos compagnons de traversée étaient de tous les pays : il
y avait une famille irlandaise, fort nombreuse, qui voyageait
dans l'espoir de rétablir la santé d'un fils aîné ; - un
médecin français, habile et spirituel, qui avait fait le
tour du monde et ne tarissait pas en anecdotes piquantes sur
les contrées diverses qu'il avait parcourues ; - un Arabe,
accompagné de sa fille, charmante enfant, qui allait
rejoindre sa famille à Tripoli. Pour ma part, je ne sais rien
d'aussi divertissant que cette société nombreuse et
mélangée au milieu de laquelle on est jeté à bord d'un
vaisseau, à condition toutefois que la mer ne soit pas trop
mauvaise, pour qu'on puisse en jouir.
La soirée se passa sans incident. Le temps était propice.
Nous côtoyâmes le cap Rosa jusqu'à la Calle, depuis
longtemps renommée pour ses lacs, ses forêts de chênes-lièges
et ses pêcheries de corail. Nous ne vîmes pas les pêcheurs
à l'œuvre, mais le capitaine nous donna les détails
suivants sur cette industrie. On taille un morceau de bois
d'un pied de longueur, en forme de croix, au centre de
laquelle on attache une grosse pierre, qui l'entraîne par son
poids au fond de la mer ; des filets très solides, en
chanvre, sont liés aux deux bras de la croix, que l'on
maintient dans une position horizontale, au moyen d'une corde
plongée dans la mer et dont on attache l'autre bout à un
bateau de pêche. Lorsque les bateliers sentent que la croix a
touché le fond de la mer, ils promènent leur embarcation en
avant et en arrière sur les couches de corail, pendant que la
lourde pierre détache le corail des rochers et le fait tomber
dans les filets ; quelquefois il reste suspendu aux bras de la
croix. Plus de deux cents barques sont ainsi employées en
même temps (la moitié environ appartient à des Espagnols).
La quantité de corail recueillie annuellement à la Calle
produit à peu près 152,800 francs.
Après avoir doublé le cap Rosa, le ciel s'assombrit, le
vent fraîchit considérablement, et nous essuyâmes un grain,
qui ne fit
|