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De temps en temps une éclaircie laissait entrevoir les montagnes à l'horizon. On n'apercevait aucune habitation. De nombreux troupeaux de chèvres, de brebis et de petit bétail brun et noir paissaient sur les coteaux, sous la garde de jeunes Arabes, qui avaient l'air encore plus farouche que leurs bêtes. C'était un lieu sauvage et désert.
 
La forêt de cêdres de Teniet-el-Had.
 
La route devenait de plus en plus à pic : aussi nous fûmes obligées de mettre pied à terre et de conduire nos montures à travers un bois de pins très touffu. Enfin, après avoir gravi ce chemin difficile et rocailleux pendant trois heures, nous nous trouvâmes tout à coup dans une vaste prairie couverte de neige, et nous aperçûmes devant nous le but de notre expédition, les cèdres magnifiques de 
    

 

   
Teniet-el-Had. Bien qu'ils ne soient pas aussi gros que ceux des montagnes du Liban (leurs troncs ne mesurent en moyenne que de dix à quinze pieds de circonférence), ils sont plus nombreux, et la neige qui brillait au soleil sur leurs rameaux légers produisait un effet charmant. Au centre de la forêt, sur un petit plateau dégarni d'arbres, s'élève un chalet pittoresque : c'est la demeure du garde, qui tient une grande salle à la disposition des personnes qui viennent ici en parties. Malheureusement il était absent. Nous dûmes nous contenter d'allumer un feu énorme de bois de cèdre tout auprès, et d'étaler notre déjeuner sur des planches dont nous fîmes une table improvisée.

Nous fûmes bientôt rejointes par les officiers avec lesquels nous avions fait connaissance la veille. Après nous avoir accompagnées pendant quelque temps, ils avaient été obligés de quitter leurs chevaux, parce que la neige n'était pas assez durcie pour les porter, eux et leurs montures : ils les avaient donc laissés chez un cantonnier, à environ deux kilomètres du chalet. Ces messieurs nous engagèrent fort à braver les mauvais chemins pour mon ter sur une terrasse d'où l'on découvre une vue magnifique. Mary s'y refusa carrément ; quant à moi, je ne pus résister à la tentation, et je partis bravement, enfonçant dans la neige moitié fondue moitié gelée (j'en avais parfois jusqu'aux genoux), jusqu'à ce que nous atteignîmes enfin le sommet du col, d'où notre petit campement près du chalet ne paraissait plus que comme un point noir. Toute fatiguée et trempée jusqu'aux os que j'étais, je ne pus m'empêcher de reconnaître que le panorama superbe qui se déroulait devant moi valait bien la peine que je m'étais donnée pour y arriver.

Les deux chaînes parallèles de l'Atlas étaient visibles. Le soleil de midi dardait ses rayons sur leurs cimes cou vertes de neige, au-dessus desquelles le Waransenis élevait fièrement sa tête. Au sud, s'étendait la fertile vallée du Chéliff, que nous avions traversée la veille ; et, bien qu'à vingt-six lieues de distance, la citadelle de Milianah brillait distinctement au soleil. Sur le premier plan autour et au dessous de nous, on ne voyait que des cèdres superbes

 
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