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, lorsqu'elle fut évacuée par les troupes vaincues d'Abd-el-Kader. C'est ici que l'émir, vêtu du haïk blanc et du burnous double de sa tribu, avec un cordon de poil de chameau enroulé autour de sa tête, se rendit au duc d'Aumale, et, descendant de sa jument favorite, ainsi que lui blessée dans le combat, plaça sa bride dans 
 
Abd-el-Kader se rend au Duc d'Aumale.
    

 

   
la main du duc en lui disant d'un ton solennel : " Jamais je ne remonterai à cheval : prends celui ci, et, puisse-t-il te porter bonheur ! " Le souvenir de ce noble chef, que nous avions vu à Damas se faire le champion des chrétiens persécutés, nous fit seul trouver un peu d'intérêt dans cette ville insignifiante. Il ne reste des anciennes constructions mauresques ou arabes qu'un fort et un château en ruines, perchés sur des falaises de quartz remplies de cristaux, qui étincellent comme des glaciers aux feux du soleil d'Afrique.

Sur la place, encadrée des cafés, restaurants, estaminets de rigueur, nous vîmes des enfants indigènes sortir en foule d'une grande maison, qui se trouva être le couvent des dames Trinitaires, ordre religieux chargé de l'enseignement dans presque toute la province d'Oran : on compte plus de deux cent cinquante de ces sœurs actuellement à l'œuvre dans les écoles. Ces dames portent un costume blanc et noir, avec une croix rouge brodée sur la poitrine. La mère supérieure, voyant que nous étions des étrangères, nous invita à entrer et à prendre du café. Il y avait environ cent cinquante petits enfants arabes et mauresques dans la salle d'asile, et dans l'école communale une cinquantaine de belles jeunes filles, tenues très proprement, mais qui avaient presque toutes des maladies d'yeux. En allant sur la plage inondée d'un soleil radieux, qui nous faisait revivre, nous nous croisâmes avec un groupe pittoresque d'Arabes arrivant de l'intérieur du pays, en compagnie de deux ou trois spahis. Ces derniers, fièrement drapés dans leurs vêtements blancs, sur lesquels était jeté un manteau rouge, se promenaient d'un air majestueux, que rehaussait encore leur taille haute de plus de six pieds. A voir leur belle démarche, on les prendrait pour les véritables seigneurs du pays ; et, il faut l'avouer, les Européens font une bien triste figure à côté d'eux. Lorsqu'on eut fini de décharger notre cargaison, nous retournâmes à bord, et cette fois-ci le temps nous fut favorable. La mer était unie comme une glace. Cette côte pittoresque, avec ses rochers, ses promontoires, ses golfes aux sables étincelants, et çà et là une antique forteresse espagnole ou une mosquée en ruines sur les hauteurs, tout nous donnait à chaque instant une envie démesurée 

 
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