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   CAHIERS DU CENTENAIRE DE L'ALGÉRIE - LIVRET XI - LA FRANCE et LES OEUVRES INDIGÈNES en Algérie         

 

LES TRANSFORMATIONS DES SOCIÉTÉS INDIGÈNES

 

Telle qu'on peut la reconstituer aujourd'hui à l'aide des documents historiques, la société indigène de 1830 est de forme oligarchique : quelques dignitaires turcs et de grands chefs arabes investis du commandement, d'assez haute allure d'ailleurs, tenant le pays sous leur autorité jalouse, fantaisiste, despotique, sans limite ni contrôle; - et la foule grouillante des douars, attardée à un stade de nomadisme pastoral, qui n'eut jamais les caractères d'idylle politique prêtés par Renan aux tribus de l'Arabie. A côté des « fils de la tente vagabonde », des groupements fermés de sédentaires : à demi-démocratiques en Kabylie, où la djemaâ dirige et réglemente la communauté, de type instable comme dans l'Aurès, l'Ouarsenis, le Dahra, où l'étroit particularisme berbère s'amollit déjà au souffle des influences « arabes » ; des fellahs perdus dans les plaines fertiles du Tell, dans quelques enclaves des Hauts-Plateaux, et que terrorisent les tribus maghzen implantées par les Turcs. Entre les chefs et la masse, et dans les villes seulement, une sorte de bourgeoisie sans racines profondes, renouvelée à chaque génération, et qui n'a rien d'une « classe moyenne » au sens précis que nous attachons à ces mots.
 
La situation de l'indigène est précaire. Sous son architecture de gros style féodal, la construction gouvernementale turque abrite l'anarchie. Aucune tradition administrative, aucune de ces règles ou de ces usages traditionnels qui, à défaut de législation, assurent la sécurité des biens et la sauvegarde des mœurs. La dévolution de l'autorité reste soumise au hasard des coups de force, à l'astuce, au « bakchich » adroitement offert.

 
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