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   Nous n'osons souscrire à cette opinion que « l'indigène étant maintenant très efficacement protégé contre la brutalité des colons, ce serait le colon qui maintenant est exposé à des accusations injustifiées ».
Enregistrons ces plaintes avec philosophie : Quel est le patron qui ne se plaint pas de ses ouvriers ? Et puis voilà que l'indigène achète de la terre, qu'il devient l'égal de l'Européen. N'y a-t-il pas quelque jalousie dans cette sévérité pour une population que l'on considérait comme subalterne ? Nous avouons avoir été beaucoup plus choqué de la brutalité de langage et de gestes de certains Européens de très basse origine envers des Arabes qui valaient mieux qu'eux et notre indignation nous place à côté de M. Marot, Directeur de l'École normale de Châteauroux, quand il critique la grossièreté des employés des Compagnies de transport et de certains petits fonctionnaires. « L'indigène paie sa place d'autocar, mais on le rudoie, on le comprime sur le toit de la voiture, on le tasse à coups de gueule et même de poings, et il accepte sans révolte apparente ». Combien y a-t-il de Français parmi ces brutes? N'y a-t-il, comme le déclare pudiquement M. Marot, parmi elles, que des « métèques, Espagnols, Syriens,  Mozabites fraîchement naturalisés » ?
Malgré ces ombres au tableau (quelle oeuvre humaine est sans ombres ?), le spectacle de la colonisation française en Algérie a causé à tous les maîtres de l'enseignement primaire qui firent ce voyage, une impression profonde. Combien pourraient déclarer avec M. Morel, professeur à l'École normale de La-Roche-sur-Yon : « m'a débarrassé du préjugé anticolonialiste auquel j'étais enclin ». Et ceci encore est un résultat qui démontre la profonde utilité des Bourses de voyage. Aucune propagande ne vaut le témoignage direct des faits.
 
      

d) Bénéfices d'un pareil voyage
pour l'enseignement

Tous les voyageurs déclarent: « Désormais je n'enseignerai plus l'Algérie comme avant ». La plupart en parleront avec un véritable amour. Quelques-uns sont devenus propagandistes. A M. Aumégeas, dont nous avons lu l'intéressante brochure destinée à ses collègues de Meurthe-et-Moselle, il faut joindre MM. Gachon et Serrèze, Directeurs d'École dans le Puy-de-Dôme, qui annoncent des publications dans « Nouvel Age » et « l'École libératrice », M. Anne qui organise, grâce au Comité Michelet des Andelys et à la « Société gisorienne  des Conférences populaires », un enseignement post-scolaire de notre grande colonie de l'Afrique du Nord. Mlle Queyret, institutrice au Cours complémentaire de Saintes, nous a donné une intéressante étude sur le port d'Oran qui mériterait la publication, M. Morel, des notes très précises sur la préhistoire nord-africaine, M. Bais, Directeur du Cours complémentaire des Andelys, le texte d'une conférence publique qu'il a faite sur son voyage, M. Sagittou, professeur à I'École primaire supérieure de Brignoles, un travail sur les richesses minières  de I'Aurès, etc. Comme l'écrit M. Dès (E. P. S. de Saint-Aignan), « le professeur décrit avec plus de foi ce qu'il aime que ce qui lui est indifférent... Il l'enseigne aussi avec plus d'assurance ». M. Debesse, professeur à l'École normale de Châlons-sur-Marne, a désormais l'idée de ce qu'est « une civilisation de pays neuf » et saura la communiquer à ses élèves. Tous ont rapporté d'abondants documents photographiques, quelques-uns ont constitué un petit musée scolaire. En somme, il est impossible de ne pas être frappé par l'excellente interprétation que tous les boursiers ont donnée à la
 

 
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