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termes, et avec une méthode pleine de clarté, l'exposé des
tentatives qui eurent successivement lieu dans la période de 1850
à 1898.
Tandis que les administrateurs militaires du Sud, officiers des
bureaux arabes des débuts, se voient dans l'obligation inévitable
de pousser leurs colonnes au contact des populations pillardes du
désert et contre les tribus plus ou moins insurgées, toute une
phalange d'explorateurs se dévouent pour pénétrer encore plus
avant et aller rechercher vers le Sud les routes du Soudan lointain
et les chemins commerciaux des pays voisins : Tripolitaine et Sud
marocain.
Dans une première période qui va des années 1853 à 1864,
l'action politique française s'insinue ainsi peu à peu vers le
Sud. Après Laghouat, Ghardaïa, Ouargla et Touggourt ont été
atteints. Dans le Sud de la province oranaise, le gouvernement
français a trouvé dans la personne du Bachagha Si Hadza Ben Eddin,
des Oulad Sidi Cheikh, un auxiliaire dévoué de notre politique de
pénétration pacifique. Peu à peu, les populations des oasis
s'habituent à recevoir nos envoyés, nos missionnaires et la seule
chose qui les surprend, c'est la prudence et l'esprit de
temporisation que nous mettons dans nos relations avec eux.
D'autre part, les régions que nous occupons en fait ou que nous
protégeons ressentent déjà les bons effets de notre présence, de
notre technique : l'oued Rhir en voie de disparaître est revivifié
grâce aux études des Jus, des Ville; une prospérité naît qui
n'a cessé de s'accroître. Plus loin, des missions économiques
vont à E1-Oued et jusqu'au Touat, à Ghadamès et Ghat poser les
jalons de notre action commerciale future.
D'autres voyageurs s'enfoncent plus loin dans le Sahara inviolé.
Parmi eux, deux appartiennent vraiment à la classe des grands
explorateurs et leurs ouvrages se peuvent presque comparer à ceux
du grand maître incontesté qu'est Barth. Il s'agit de Rohlfs et
surtout de Duveyrier.
Le premier, Allemand d'origine, ancien soldat de notre Légion
étrangère, a réussi à effectuer une exploration transversale du
Tafilalet à la Tripolitaine, en passant par le Touat, le Gourara et
le Tidikelt. Le premier, il a montré que ces régions formaient des
dépendances naturelles de l'Algérie et il a indiqué le chemin à
d'autres expéditions qui peu à peu et avec plus ou moins de
succès se sont orientées vers ces contrées. |
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Duveyrier, de son côté, a été le premier voyageur à entrer en relations
suivies, cordiales, presque amicales avec les Touareg du Nord et les études
qu'il a rapportées de ses voyages sont restées, documents de base pour tous
ceux qui ont eu à faire de la politique touareg. Il était encore tout jeune
lorsqu'il se rendit à El-Goléa, puis à Ouargla pour entreprendre son
voyage. Il eut la bonne fortune grâce à sa vaillance, à la belle
générosité de son caractère, de gagner l'amitié du cheikh Otman, chef des
Iforhas et d'Ikhenoukhen, ammenokhal des Touareg Ajjers, qui couvrirent le
jeune voyageur de leur haute protection, ce qui lui permit de voyager
librement parmi eux, de recueillir des informations précieuses et, entre
autres, les éléments d'une carte dressée en grande partie pour
renseignements, et qui est aujourd'hui encore demeurée actuelle.
Duveyrier, à la suite d'une grande maladie contractée au cours de ses
voyages, dut alors suspendre ses explorations et cela est profondément
regrettable. Tout au moins continuera-t-il de diriger et de patronner les
efforts des hommes de bonne volonté qui après lui entreprirent de conquérir
le désert.
Ainsi, tandis que Barth avait dépeint exactement les riches contrées
soudanaises, Duveyrier venait de révéler que le Sahara ne constituait pas,
en partant de l'Afrique du Nord française, une barrière infranchissable.
Pendant longtemps 1e type du guerrier touareg qu'il avait campé : brave,
généreux, fidèle à sa parole, chevaleresque, resta fixé. Et à vrai dire
cette représentation du caractère touareg qu'avait donnée à Duveyrier une
noble reconnaissance, doit être mise à l'origine de plusieurs échecs et
même de drames affreux qui marqueront notre pénétration ultérieure.
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