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III
Les premiers projets
du chemin de fer transsaharien
L'échec de la mission Flatters
En fait, les récits de voyages de tous ces explorateurs,
militaires, civils, religieux, avaient frappé vivement
l'imagination et l'opinion françaises. Sans doute se fit-on au
début de singulières illusions sur la signification de traités
comme celui de Ghadamès et de Ghat, traités signés avec des chefs
indigènes dont les titres nobiliaires l'emportaient et de beaucoup
sur leur faible autorité. Sans doute aussi, se faisait-on encore,
faute d'avoir médité suffisamment les
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pas se laisser abattre. Une grande commission fut nommée par M. de Freycinet,
alors ministre des Travaux publics, pour étudier la question, et de
nombreuses missions dirigées par des hommes de talent, les Pouyanne, les
Choisy, les Rolland, furent envoyées dans le sud algérien pour en examiner
les possibilités de réalisation.
Aucune d'entre elles n'obtint de résultats décisifs, car elles ne
dépassèrent en aucun point la ligne précédemment atteinte par nos premiers
explorateurs.
Seules les missions dirigées par le lieutenant-colonel Flatters, ancien chef
du bureau arabe de Laghouat, réussirent à pousser au Sud la ligne Ghadamès,
Temassinine, El-Goléa, précédemment atteinte.
Il n'est pas nécessaire de rappeler ici l'effroyable issue de cette aventure.
Après une tentative de percée vers le Soudan par les régions Ajiers,
Flatters, contraint à la retraite mais non découragé, se porta franchement
sur le Nord-est du Hoggar d'où il escomptait gagner le Soudan de Zinder et de
Kano par le puits d'Assiou.
Le massacre de la mission Flatters à Bir-El-Gharama (16 février 1881), les
épisodes douloureux de la retraite des vestiges de son escorte vinrent, pour
un temps, porter un coup fatal à la question qui paraissait en si bonne voie,
du chemin de fer transsaharien.
Le chef de la mission avait en réalité affronté, avec des moyens matériels
insuffisants, une tâche à ce moment-là prématurée. Son oeuvre était
condamnée d'avance; eût-elle réussi à atteindre le Soudan, elle n'était
nullement assurée de l'accueil qu'elle y trouverait chez des sultans noirs
puissants, cruels et disposant de troupes nombreuses... Ii ne pouvait être
question d'un succès pour une mission de ce genre qu'autant qu'une tête de
pont soudanaise, sur l'autre rive du Sahara, lui permettrait de s'y
réorganiser en vue d'un retour difficile. Dix-huit ans plus tard, la mission
Foureau-Lamy allait démontrer à nouveau, par l'exemple, que cette condition
était primordiale. Que serait-il advenu d'elle, malgré son admirable
encadrement et sa solide organisation, si elle n'eût trouvé Zinder déjà
occupé et nos soldats soudanais prêts à l'accueillir ?
C'est devenu un lieu commun d'assurer que la mission Flatters porta un coup
décisif à l'oeuvre de la pénétration française au Sahara et que
l'exécution du Transsaharien s'en trouva reculée de vingt années.
En vérité, à quoi pouvait correspondre cette conception à priori d'une
voie ferrée intercoloniale, sinon internationale,
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