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s'enfoncèrent dans le Sahara, leurs projets furent dénoncés par
les marabouts musulmans; il n'était guère nécessaire d'exciter
l'ardeur guerrière des pillards sahariens qui accueillirent avec
joie cette manière de gagner le ciel en réalisant de fructueux
pillages. Les premiers, les pères Paulmier, Minaret et Bouchard,
furent assassinés tout près d'Hassi Inifel. Quelques autres
meurtres, survenus après le succès du voyage à Ghadamès et aux
régions Ajjers des Pères Richard et Kermabon, vinrent sinon
éteindre, du moins rendre plus circonspect le zèle de ces
néophytes. Mais les travaux qu'ils rapportèrent, et le bruit même
fait autour de leur mort, servirent la cause de la pénétration
française à laquelle d'autres explorateurs comme Soleillet,
Dournaux-Duperré, les capitaines Mircher et de Polignac,
l'explorateur Largeau, apportèrent aussi leur contribution.
L'esprit primitif de propagande religieuse et de conquête morale
qui avait soulevé la grande âme du cardinal Lavigerie n'a pas
été perdu. Les vocations pour la congrégation qu'il a fondée se
manifestent chaque jour plus nombreuses et les Pères Blancs ont
repris avec méthode et circonspection l'oeuvre de pénétration
morale entreprise par le fondateur de leur ordre.
Il me souvient d'avoir connu vers 1896, à Tombouctou, un Père
Blanc, à l'esprit fougueux et à l'âme généreuse, qu'on fut
obligé d'arrêter au moment où, un fusil à la main, il
poursuivait un notable musulman qu'il accusait d'avoir vendu une de
ses esclaves noires. Dans un autre ordre d'idées, il suffit
d'entendre les paroles du grand cher actuel de l'ordre, le R. P.
Voillard ou bien du Métropolite de Carthage, Mgr Lemaitre, pour se
rendre compte que la bonne semence n'a pas été perdue. Toutefois
il faut rendre cette justice aux Pères Blancs qu'ils ont désormais
et depuis longtemps renoncé à tout esprit de propagande
confessionnelle pour se réfugier dans des oeuvres de charité et
d'enseignement professionnel et agricole, et que, admirablement
secondés par les Sœurs Blanches de Notre Dame d'Afrique, ils ont
repris sur d'autres bases les projets du grand Cardinal. Par leurs oeuvres
d'éducation surtout professionnelle, de développement économique,
de pure charité ils ont conquis des droits à l'estime de
l'administration et à la reconnaissance des populations même
musulmanes. Ces résultats sont bien de l'inspiration du grand
prélat français. |
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