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   Bref, de ce côté, la situation fut rapidement rétablie, et si, faute de pouvoir prendre vis-à-vis du Tafilalet, d'où continueraient longtemps encore de partir des harkas contre nos détachements et nos gens, les résolutions nécessaires, un résultat décisif ne put être obtenu, du moins furent supprimés les incessants coups de main et même les meurtres individuels qui avaient marqué la précédente période.
Tandis que Lyautey commençait, dans le Sud algérien, la magnifique oeuvre que désormais il allait poursuivre sans arrêt jusqu'à son couronnement, dans le Sahara méridional et oriental une oeuvre non moins magistrale, et peut-être plus originale en soi, était en voie de création.

Le commandant Laperrine fut le principal artisan de cette création. Mais à côté de lui, et de ses collaborateurs immédiats, il nous faudra montrer deux autres grandes figures qui presque jusqu'à leur mort seront inséparables de la sienne. Il s'agit du saint missionnaire le Père de Foucauld et du grand chef des Hoggar Moussa Ag Amastane. A eux trois, ils ont résumé l'œuvre principale de la France de 1902 à 1913.

Lorsque, pour la première fois, je rencontrai le capitaine Laperrine à Tombouctou, en 1896, il s'était déjà fait un nom dans le Soudan par la part glorieuse qu'il avait prise aux précédentes colonnes, contre Samory, sultan négrier, et contre les Touareg. A la tête d'une troupe incomparable, qu'il avait modelée à son image, l'escadron de spahis soudanais, il était venu prendre position en face des Touareg formant l'extrême pointe vers le Nord et l'Est de la pénétration française.

Déjà par des contacts journaliers il était entré en relations avec les tribus touareg du fleuve. Il comptait parmi eux de nombreux amis et avait su deviner à côté de leurs défauts d'hommes farouches et indomptables leurs qualités de bravoure et de générosité foncière qui formaient un si étrange contraste avec leurs brusques accès de sauvagerie et de brigandage. Aussi, lorsqu'aux derniers jours de 1896, on l'invita à rentrer en France, il fit tout son possible pour rester au Soudan Grâce à une mission de confiance qui l'envoya vers la ville maure de Bacikounou, pour y recueillir un officier de tirailleurs parti sans ordre à sa conquête, il put retarder de quelques semaines l'échéance redoutée. Enfin il fallut partir.

Le capitaine Laperrine emportait du moins, avec tout un bagage de connaissances pratiques dans le maniement
      

des indigènes, une science assez complète de l'âme et du caractère touaregs; - il avait même pris contact au combat d'Akenken avec des guerriers venus du Hoggar et sa curiosité s'était sentie éveillée de ce côté.
Deux ans plus tard, le capitaine Laperrine était à la tête de l'escadron de spahis sahariens montés à méhari que le capitaine Germain venait de créer à El-Goléa.
A ce moment la poussée vers le Sahara s'accentuait; Foureau et Lamy avaient réussi leur mission. Le capitaine Pein et Flamand avaient pris possession d'In Salah et la poussée circulaire qui, partie d'El-Goléa,

 
TIMIMOUN: Place Laperrine
s'était exercée vers le Touat et le Gourara, avait abouti à la fondation des postes d'Adrar et de Timimoun. On sait que cette conquête avait entraîné des dépenses énormes et motivé la création de l'organisme des Territoires du Sud.

Le commandant Laperrine présenta à ce moment ses projets de formation de troupes méharistes indigènes très mobiles, recrutées parmi les grands nomades eux-mêmes et fortement encadrés par des éléments français de choix. Ces troupes se substitueraient très économiquement aux éléments réguliers entretenus jusqu'à ce moment à très grands frais. Du point de vue administratif, les officiers de ces nouvelles troupes rassembleraient entre leurs mains tous les pouvoirs et auraient à assurer l'administration immédiate des quelques tribus du Sahara. Ces mêmes
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