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   avances avec froideur. Mais le général Desmichels, qui avait signé un traité avec Abd el Kader, mit les émissaires de l'agha en prison, et envoya à l'Émir 400 fusils et de la poudre! Mustapha ben Ismaël constata, d'autre part, que le Sultan du Maroc, sensible au prestige religieux de l'Émir, ne manifestait plus à son égard la même sympathie. Vers qui pouvait-il dés lors se tourner ? Après un nouveau combat avec Abd el Kader, dans lequel il fut vaincu, il tenta une entrevue avec lui; mais il ne put se résoudre à s'humilier devant ce jeune homme de sainte éducation, et déclara qu'il préférait vivre avec les Turcs, qu'il avait toujours servis. Il alla, suivi de 50 ou 60 familles des Douairs et Smela, s'enfermer dansle Mechouar de Tlemcen avec les Koulouglis.
Abri et Kader donna aux Douairs et Smela un autre agha et leur interdit toute communication avec les Chrétiens d'Oran. Des infractions à cette interdiction ayant été commises, Abd el Kader voulut sévir; mais les tribus se soulevèrent contré lui, et, à l'exception d'un petit groupe, se placèrent sous la protection, du général Trézel, successeur de Desmichels à Oran. Le Maghzen se trouvait en quelque sotte reconstitué au profit des Français, et participa à l'expédition du maréchal Clauzel sur Mascara par un contingent de 500 cavaliers et de 800 chameaux de transport.
Lorsque Mustapha ben Ismaël fut enfin délivré, par l'expédition de Clauzel sur Tlemcen, du siège qu'il subissait dans le Mechouar, il dit au Maréchal : " En te voyant, j'oublie mes malheurs passés, je me confié à ta réputation. Nous nous remettons à toi, moi et les miens, et tout ce que nous avons; tu seras content de nous. " Il tint parole, car il reprit dès lors la lutte contre Abd el Kader, éclairant et couvrant les colonnes françaises à la tête de ses cavaliers Douairs et Smela.
En avril 1836, il accompagna le général d'Arlanges, qui avait reçu ordre du maréchal Clauzel d'aller d'Oran à la Tafna, et d'assurer la liaison de Rachgoun à Tlemcen; il lui donna les conseils que lui dictait son expérience, mais il ne put l'empêcher d'aller se heurter dans les montagnes aux masses kabyles animées par Abd el Kader, et de se faire acculer à la mer au camp de la Tafna. Il se conduisit admirablement au cours de ces journées, où tombèrent nombre de ses cavaliers. Bugeaud étant arrivé avec des renforts, Mustapha prit une part brillante au combat de la Sikkak où Abd el Kader fut battu; il y fut grièvement blessé d'une balle à la main.
      

En concluant l'année suivante avec Abd el Kader le traité de la Tafna, Bugeaud eut la faiblesse d'abandonner à l'Émir non seulement le Mechouar de Tlemcen, où avaient tenu si longtemps Mustapha ben Ismaël et les Koulouglis, mais le territoire même des Douairs et Smela, la plaine de Mleta ; il reconnaissait d'ailleurs formellement le pouvoir de l'ennemi de la France. Mustapha, en recevant connaissance de ce traité, n'éleva pas de protestation; il se borna à dire : " Vous savez mieux que moi ce qui vous convient, mais j'estime que vous commettez une faute que vous ne tarderez pas à regretter. " les événements ne devaient que trop justifier cette appréciation, puisqu'Abd el Kader, après avoir organisé ses forces. reprit les hostilités en novembre 1839.
L'attitude prise, dans la province d'Oran, contre le représentant d'Abd el Kader, Bou Hamedi, était défensive, lorsque l'arrivée du général de La Moricière dans la province, puis de Bugeaud comme gouverneur en mai 1841, modifièrent le caractère de la lutte. Le vieil agha, qui avait reçu le grade de général français, prit part dés lors, avec ses cavaliers, aux expéditions de la colonne de La Moricière, jouant en bien des circonstances un rôle important. Il accompagna cette division, à la tête d'un goum de 600 cavaliers, à l'expédition de Bugeaud en mai 1841 contre Tagdempt et Mascara.
C'est avec La Moricière aussi que, en juillet 1842, il atteignit, en poursuivant Abd el Kader vers le sud, le village de Goudjilah, vrai nid d'aigle où l'Émir avait porté les approvisionnements qu'il avait pu sauver de Tagdempt Dans cette circonstance, le général Mustapha manifesta la joie la plus sincère : monté au point le plus élevé de la montagne, d'où il découvrait au nord le Tell, et au sud à perte de vue les plateaux mamelonnés allant vers le Sahara, il s'écria : " Fils de Mahi ed Dine (Abd el Kader), ce pays ne peut pas être destiné à appartenir à un marabout (personnage religieux) comme toi, à un homme de Zaouïa (école religieuse). Enlevé par la conquête à ceux que j'avais servis toute ma vie, c'est à la nation qui a su leur arracher qu'il revient, et non pas à toi, qui n'avais fait que le voler. J'ai aidé de toutes mes forces les Français à reprendre leur bien, parce que moi, soldat, je ne pouvais obéir qu'à des soldats. je les ai conduits jusqu'aux portes du Sahara. Je puis maintenant mourir tranquille. Justice complète sera bientôt faite de ta ridicule ambition. "
L'année suivante, en 1843, le général Mustapha était en

 
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