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des motifs et à l'utilisation des ornementations les plus
savoureuses de l'Islam.
C. - La Restauration de la Palette
Le dessin restauré, il fallait ranimer la palette.
Un tapis du Sud, dans le salon de Madame Homais, allume un incendie.
Sitôt déroulé, il supprime la Vénus à sourire international de
la cheminée, les Hercules gonflant leurs muscles en faux bronze et
les aquarelles marines où se manifeste l'âme bleue des jeunes
filles. Des tapis crépitants de soleil, qui prennent accent au
plein midi saharien, détruisent d'une flambée un intérieur
citadin. On oublie qu'ils doivent être étendus en plein air, sous
le ciel brûlant, dans l'air gui tremble de chaleur, parmi les
herbes desséchées où vibrent les sauterelles. Et ce fut le
premier grief.
Le second, plus sérieux cette fois, visait la solidité de la
couleur. Les premiers tapis teints à l'aniline s'éteignirent dans
une lavasse triste. Ils avaient vécu l'espace d'un matin berbère.
Il fallait trouver un coloris plus solide. Il y eut de longs
tâtonnements, des essais infructueux. A distance l'effort paraît
magnifique. " Il y eut unanimité pour reconnaître que le mal
avait sa source dans l'emploi de colorants artificiels modernes ne
résistant ni à l'eau, ni à la lumière. Les acheteurs ne
voulaient plus, à aucun prix, des tapis algériens parce que leurs
couleurs étaient trop fugaces. Par suite la production, diminuant
de jour en jour, était sur le point de disparaître.
" Une solution, très logique au premier abord, frappa tous les
esprits. La passé avait été, glorieux, les spécimens de la bonne
époque le prouvaient; donc, pour rénover ce qui avait été
prospère, il fallait faire un retour en arrière et recommencer à
teindre à l'aide des couleurs végétales. " (Delaye).
Quelques chercheurs, animés des meilleures intentions, ouvrirent
une polémique pour le retour aux " couleurs végétales
". Ils oubliaient que si elles avaient satisfait à la
production limitée de l'Algérie turque, elles ne pouvaient suffire
à la teinture des nombreux tapis tissés dans les Ecoles-ouvroirs.
On perdait de vue ,que, si quelques herbes donnent du brun, du noir,
du jaune, du rouge, tous les autres colorants, usités dans la
Régence, provenaient de l'importation étrangère. Ne
négligeait-on pas, enfin, l'immense transformation consécutive à
l'occupation française :
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à la patiente
recherche des plantes tinctoriales, aux procédés primitifs
de préparation, il convenait de substituer des méthodes
rapides et modernes. Aucun berger n'a plus le temps de
recueillir, entre les cinq prières rituelles, la cochenille
des Chênes-Kermès. Le rythme de la vie se précipite. |
Et puis, pourquoi condamner sans appel les colorants d'origine
minérale?
L'expérience de l'aniline était désastreuse, soit; mais
l'aniline n'est qu'une note, et très basse, dans la gamme de
la chimie industrielle. Le bleu et le violet de cobalt,
l'outremer de Guimet, le brun Van Dyck, le jaune de cadmium,
les chromates de zinc, par exemple, vendus par le commerce,
offrent un éclat, une solidité, des conditions de modicité
qui frappent la tisseuse.
L'alizarine, notamment, a fait depuis 1904 des progrès
considérables dans la chimie des couleurs. |
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Sa préparation, de
plus en plus savante, s'est affranchie des imperfections du
début: la nuance rose, si difficile, a été réalisée; la
taie voilée s'est résorbée; l'éclat atteint désormais un
timbre franc et loyal. Elle peut donner des tons exceptionnels
" résistant aussi bien à la lumière et au lavage que
la meilleure garance, avec l'avantage de laisser la laine plus
souple. " (Delaye). L'indigotine synthétique, les
oxyquinones, rendent d'excellents services et remplacent avec
avantage les couleurs végétales.
L'Administration a tenté l'expérience, en évitant de se |
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