|
Le lendemain de l'abdication du dey, il rallia les fuyards, et,
refusant de répondre aux dépêches du général de Bourmont qui
l'engageait à demander l'aman, regagna Constantine. Son premier
soin en rentrant dans son palais fut de faire égorger en masse les
janissaires qui, pendant son absence, l'avaient déclaré déchu du
pouvoir; après quoi, il prépara la défense et attendit les
événements.
Marcher contre lui et porter la guerre
dans un pays presque inconnu était chose périlleuse. Le maréchal
Clauzel, qui avait remplacé Bourmont dans le commandement de
l'armée (2 septembre 1830), n'osa pas tenter l'aventure: pensant
mieux faire et se croyant investi de pouvoirs illimités, il offrit
au bey de Tunis de lui céder la province de Constantine, qu'il
administrerait pour le compte et sous la protection de la France.
Ces propositions furent favorablement accueillies par la Cour du
Bardo, mais elles furent hautement désavouées par le gouvernement
français. Le maréchal résigna ses fonctions et la situation
politique d'Ahmed s'en trouva consolidée.
Le cabinet des Tuileries n'admettait
point, cependant, que la prise d'Alger dût être l'unique résultat
de la campagne il fut donc décidé en principe que les
points principaux de la côte seraient occupés par nos troupes,
l'exécution de ce projet restant d'ailleurs soumise à certaines
conditions de temps et d'opportunité.
Le port le plus important était celui de
Bône. Le général Damrémont s'y transporta avec sa brigade,
débarqua sans être inquiété, puis s'installa militairement dans
la ville (2 août 1830); malheureusement, le peu d'hommes dont il
disposait ne lui permit pas de s'y maintenir et il fut, presque
aussitôt, contraint de l'évacuer. L'année suivante (13
septembre), sur les sollicitations pressantes des habitants, une
compagnie de zouaves indigènes (commandant Houder), vint occuper la
place, mais elle en fut chassée peu de temps après par les
partisans du bey ;
|
|
|
|
enfin, dans la nuit du 26 mars 1832, les capitaines Yusuf et d'Armandy,
à la tête de 30 matelots de la Béarnaise, escaladèrent
les murs de la Casba et s'emparèrent de la forteresse. trois mois
plus tard (26 juin), le général Monk-d'Uzer s'installa dans la
ville.
On s'en tint là pour le moment, parce qu'il fallait parer au
plus pressé et ne point aggraver une situation que le moindre
échec pouvait compromettre. Ahmed connaissait les causes de notre
inaction : mais trop faible pour engager la lutte et trop habile
pour associer sa fortune à celle d'Abd-el-Kader, il se confina dans
son palais, laissant à ses aghas la garde et la défense des
frontières.
Cet état de choses prit fin en 1836, lorsque le maréchal
Clauzel, qui avait remplacé le comte d'Erlon (8 juillet 1835)
obtint du ministère, pour son malheur et le nôtre, l'autorisation
d'assiéger Constantine.
Partie de Bône (13 novembre 1836),
l'armée arriva le 21 sous les murs de Constantine, sans avoir
presque tiré un coup de fusil, mais déjà à moitié ruinée par
les privations et la fatigue.
Le maréchal n'en fut point troublé :
on lui avait affirmé que les habitants se rendraient sans combat,
et il attendait patiemment la députation qui devait lui apporter
les clefs de la ville, lorsque le feu d'une batterie, soudainement
démasquée, vint détruire ses illusions.
La première et la deuxième brigade,
sous le commandement du général de Rigny, reçurent l'ordre de se
porter sur le Coudiat-Aty, d'occuper les enclos et de s'emparer des
approches : inquiétée dans sa marche par les tirailleurs arabes,
la tête de la colonne fut un instant repoussée; mais bientôt,
soutenue par le 17e léger, elle culbuta l'ennemi, qui s'enfuit en
désordre. Le reste de l'armée s'établit à Mansoura. |
|