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commandant Miller. La compagnie de voltigeurs commandée par le capitaine Cavadini, bravant la fusillade de la colline, pénétra à la course dans le village, et prenant la position à revers, elle la couronna bientôt L'ennemi se précipita en masse dans un ravin pro fond, où M. le capitaine Chabord lui lança des obus qui durent lui faire du mal.

Dans ce moment, les masses ennemies étaient en pleine retraite sur de très-hautes montagnes. Les chevaux étaient harassés, l'infanterie n'avait pas encore mangé ; je n'avais que les cartouches de mes gibernes ; il était trois heures après-midi, je fis cesser la poursuite ; je ralliai les troupes et les ramenai au camp sur la rive gauche de l'Oued-el-Neça.

Ainsi a été dispersé un très-gros rassemblement préparé depuis longtemps et fanatisé par Ben-Salem. Ce résultat a été obtenu par cinq bataillons qui avaient laissé des hommes à la garde de leurs sacs, et par 600 chevaux arabes soutenus par 80 chevaux français.

Cependant, il n'est pas possible d'évaluer la réunion des Kabyles à moins de 8 à 10 mille hommes. Voilà une preuve de plus que, passé un certain chiffre relatif, il ne faut pas se laisser arrêter par la force numérique des masses sans organisation et sans discipline, quelque braves que soient les hommes qui les composent, pris individuellement. Si je n'avais pas compris les désavantages que leur procure l'absence d'harmonie et de force d'ensemble, j'aurais pu hésiter à me jeter au milieu d'elles avec des forces si inférieures, numériquement ; mais en les coupant en deux, j'ajoutais encore au désordre qui règne naturellement dans une telle troupe.

Notre perte a été légère pour une affaire de cette importance ; nous n'avons eu que trois tués et une vingtaine de blessés. Il est difficile d'évacuer la perte de l'ennemi, si ce n'est sur le lieu où a 

    

 

   
chargé la cavalerie. Partout ailleurs le combat a eu lieu dans des rochers, des ravins, des villages escarpés, où l'on ne peut apprécier le mal qu'on a fait à ses adversaires ; mais on ne l'estime pas à moins de 350 hommes tués.

J'ai lieu d'espérer que ce combat heureux dégoûtera les populations des grands rassemblements que provoquent Ben-Salem et trois ou quatre autres chefs fanatiques. Quand elles n'auront plus l'espoir de vaincre, il est probable qu'elles feront leur soumission ; alors la France aura ajouté à ses conquêtes une contrée riche, belle, et probablement la plus peuplée de l'Algérie. Cette partie du pays des Kabyles peut être au moins comparée aux rives du Chèliff ; la nature a beaucoup fait pour elle, mais la culture des terres y est aussi barbare qu'ailleurs, ce qui n'empêche pas qu'elles soient en général couvertes de belles et vastes moissons cette année.

Je ne saurais trop vous faire l'éloge, monsieur le Maréchal, du dévouement et de l'ardeur des troupes qui ont été engagées. Voici les noms des officiers et soldats qui se sont le plus particulièrement distingués :

M. le lieutenant-colonel Daumas, qui commandait le goum des Arabes, et a conduit habilement la charge de la cavalerie française et indigène.
M. le capitaine Pellé, adjoint au directeur des affaires arabes, qui a constamment marché à la tête de la charge et a tué cinq Arabes de sa main.
M. le capitaine d'artillerie Rivet, mon officier d'ordonnance, qui a figuré également au premier rang, et a tué trois Arabes de sa main.
M. le capitaine d'état-major Gaboriau, attaché aux affaires arabes,
M. le docteur Amstein, chirurgien du bureau arabe.

 
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