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la rive gauche, sous la protection d'un bataillon du 48e. Tout le reste de l'infanterie mit sac à terre sur les bords de la rivière et vint se former par bataillon en masse au bas de la pente par laquelle descendait l'ennemi. J'avais embusqué la cavalerie arabe à un quart d'heure sur ma gauche, dans un pli de terrain où elle ne pouvait être aperçue. Au signal d'un coup de canon, elle devait assaillir le flanc droit de l'ennemi.

M. le colonel Regnault du 48e, qui du camp apercevait ce que je ne pouvais pas voir, me fit prévenir que l'on voyait descendre une forte colonne d'infanterie kabyle. Il était alors dix heures et demie ; il fallait bien pousser l'ennemi pendant au moins trois lieues, puis revenir à nos sacs pour aller coucher au camp, je n'avais donc pas de temps à perdre ; je donnai le signal, et je fis monter l'infanterie sur le premier plateau. Ma cavalerie arabe, conduite par M. le lieutenant-colonel Daumas et MM. les capitaines Pelté et Gaboriau, du bureau arabe, arriva promptement, bien qu'elle eût à traverser un terrain fangeux. La cavalerie ennemie fut repoussée et chassée de tous les plateaux qu'elle occupa successivement.

J'avais réuni sous les ordres du capitaine d'état-major de Cissey, 50 maréchaux-des-logis ou brigadiers du train des équipages militaires, 9 gendarmes, 20 spahis et quelques chasseurs de mon escorte, pour former la réserve du goum arabe ; c'étaient les seuls cavaliers français dont je pouvais disposer, ma cavalerie régulière ayant été laissée à Bordj-el-Menaïel. J'ai eu beaucoup à me louer de cet escadron vraiment d'élite. Vers la fin de la charge, qui s'est terminée à trois lieues et demie de la rivière, il était en tête, et c'est à lui et à quelques officiers énergiques que nous devons d'avoir sabré bon nombre d'Arabes.

L'infanterie kabyle, en voyant ainsi mener sa cavalerie, s'empressa de reployer et de prendre position sur une chaîne de collines élevées qui formait un grand arc de cercle dont l'un des 

    

 

   
bouts touchait à ma direction, pendant que l'autre bout en était peu éloigné. J'avais donc presque tous les ennemis sur le côté droit de ma ligne de marche. L'infanterie de ma colonne étant arrivée en face du sommet de l'arc, je fis faire tête de colonne à droite, et je fis attaquer le sommet de l'arc par un bataillon du 48e, sous les ordres de M. le lieutenant-colonel de Comps et par le bataillon de tirailleurs indigènes, sous les ordres de M. le commandant Vergé, pendant que ma cavalerie continuait son mouvement direct et attaquait l'extrémité droite de l'ennemi.

Sa ligne de défense fut bientôt coupée en deux, et il se mit à fuir sur toutes les arêtes et dans tous les ravins en arrière de lui. La cavalerie aborda une grosse masse et en coupa une partie qui eût été prise ou tuée en entier, si, au lieu de cavalerie arabe, nous avions eu les 550 chevaux laissés au camp du général Gentil ; mais nos cavaliers arabes n'agirent pas avec la même décision qu'auraient eue des troupes françaises. Toutefois, il resta sur ce point environ 150 hommes sur le terrain ; on y prit un drapeau, beaucoup de fusils, de yatagans et de flissas (sabres des Kabyles).

Les deux bataillons précités, après avoir enlevé le centre de la position, se rabattirent à droite et à gauche, et chassèrent successivement l'ennemi de toutes les collines dont l'abord n'était pas trop difficile. Cependant l'ennemi tint un instant sur une colline de gauche très-escarpée, au bout de laquelle était un village. J'y envoyai un demi-bataillon d'élite composé de canonniers armés de grosses carabines, sous les ordres de M. le capitaine du génie Jacquin. Cette petite troupe, ne connaissant pas le terrain, s'embourba dans un marais avant d'arriver au point d'attaque. Celte hésitation forcée ranima les nombreux Kabyles qui se trouvaient en face, et ils essayèrent de reprendre l'offensive.

Je fis avancer aussitôt le bataillon du 26e, sous les ordres du 

 
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