Pages précédentes LA GRANDE KABYLIE   NOTE H Pages suivantes
 473 Retour page Table des matières
   
  
 

NOTE H.

 
Rapport de M. le Maréchal , Gouverneur-Général, sur le combat du 17 mai 1844.
 
Du sommet des montagnes des Flissas, le 18 mai 1844.
 
MONSIEUR LE MARÉCHAL,

Dans ma dépêche du 16, je vous disais qu'il s'opérait devant moi un gros rassemblement que je comptais attaquer le lendemain. Pendant le reste de la journée, nous vîmes très-clairement arriver plusieurs contingents. Les chefs des Issers, qui se trouvent dans mon camp, et qui sont liés de parenté avec les chefs des Ameraouas et des Flissas, avaient envoyé à leurs alliés des émissaires pour les engager à éviter, par la soumission, les malheurs qui allaient fondre sur leur pays ; ceux-ci firent une réponse qui prouvait qu'ils étaient bien décidés à en appeler aux armes.

Les envoyés ajoutèrent qu'ils étaient très-nombreux ; ils firent une longue énumération des tribus lointaines qui avaient amené leurs contingents. Les seules tribus du bord de la mer, battues à Taourga, le 12, n'étaient pas à ce rassemblement. La position qu'occupaient ces masses était formidable ; elles s'appuyaient à droite sur des montagnes inférieures à la crête de partage, mais d'un abord très-escarpé.

De là, elles se prolongeaient sur une arête qui conduit à la grande crête, et qui est couverte, dans tout son parcours, par un ravin très-profond ; elles avaient ajouté, à ces difficultés, des redans en pierres sèches sur tous les abords. La ligne des crêtes forme, avec l'arête qu'occupaient les contingents étrangers, un angle très-ouvert. Ces crêtes étaient défendues par les guerriers des 

    

 

   
dix-neuf fractions des Flissas, qui devaient être soutenues par d'autres contingents venus par le sud.

Ne voulant pas attaquer de front des obstacles de cette nature, je résolus de monter aux crêtes supérieures, par une arête qui ne me paraissait pas trop difficile, et qui me conduisait au sommet de l'angle rentrant, qui formait la ligne de bataille ennemie. Je passais ainsi parallèlement à sa droite ; mais je n'avais pas à redouter une attaque par mon flanc gauche, à cause du grand ravin dont j'ai parlé plus haut : j'étais également couvert sur mon flanc droit par un autre grand ravin.

Je n'avais donc à livrer, en montant, qu'un combat de tête de colonne, et la vigueur de nos troupes m'en garantissait le succès. Les zouaves marchaient en tête avec la compagnie de carabiniers du 3e bataillon d'Orléans et une section de sapeurs ; suivaient le bataillon d'élite, trois pièces de montagne, cent chevaux français et arabes, commandés par le chef-d'escadron Denoue. Les tirailleurs indigènes, deux bataillons du 3e léger, deux bataillons du 26e, deux bataillons du 48e, des détachements de cacolets étaient répartis le long de cette colonne.

M. le général Korte, au point du jour, devait, par la plaine, menacer la droite de l'ennemi avec le reste de la cavalerie française, six cents chevaux arabes, deux bataillons et une pièce de montagne. Il était à espérer qu'il pourrait atteindre, dans la vallée de l'Oued Kessub, qui se trouvait derrière la droite des coalisés, les masses que nous allions précipiter des hauteurs.

Ayant à gravir pendant longtemps des pentes très-raides, je fis laisser au camp, sous la protection d'un bataillon et des troupes du train des équipages, les sacs des soldats ; ils n'emportaient que du biscuit pour deux jours, deux rations de viande cuites et les cartouches excédant celles qui sont dans la giberne, le tout roulé dans le sac de campement porté en sautoir.

 
Pages précédentes   Retour page Table des matières   Pages suivantes