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suivre, c'est de ruiner le pays
pour les décourager. » La Kahina finit par succomber, et
ses fils, dont elle avait elle-même préparé la
soumission, se mirent au service des vainqueurs.
Ce premier ban de conquérants arabes était trop peu
nombreux pour qu'ils fussent réellement les maîtres du
pays ; ils y laissèrent quelques garnisons et quelques
missionnaires. Mais au fond, la Berbérie restait berbère
et si les conquérants arabes ont pu venir à bout
momentanément de la résistance des indigènes, c'est
vraisemblablement parce qu'ils ont donné un aliment à leur
ardeur guerrière en les entraînant à la conquête de
l'Espagne. Ils les conduisirent jusqu'en Gaule, où Charles
Martel les arrêta à la bataille de Poitiers (732).
Les Berbères passèrent avec une rapidité qui surprend à
la religion des envahisseurs ; il est vrai qu'ils
l'abandonnèrent plus facilement encore. Les historiens
arabes disent qu'ils apostasièrent jusqu'à douze fois en
moins d'un siècle. L'Islam leur apparut sans doute comme
une nouvelle hérésie chrétienne; il annonçait un Dieu
unique, l'égalité et la fraternité de tous les vrais
croyants. Plus de privilèges, plus de gouverneurs
étrangers, plus de fisc impérial. Il y avait gloire et
profit à suivre le drapeau des conquérants et à marcher
derrière eux au pillage de l'Europe. Les Berbères
devinrent musulmans comme ils étaient devenus chrétiens et
à peu près pour les mêmes raisons. |
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LES
KHAREDJITES |
De même que jadis ils avaient
dressé l'église donatiste contre l'église catholique, les
Berbères opposèrent à l'orthodoxie musulmane la doctrine
kharedjite. Cette secte était apparue en Orient peu de
temps après la mort du Prophète, au moment de la lutte
entre Ali et son compétiteur Moaouïa. Elle ne survit plus
aujourd'hui qu'au Mzab, mais elle a un moment dominé une
grande partie de l'Afrique du Nord et tenu une place
considérable dans la vie de l'Algérie du huitième siècle
au dixième siècle. Le kharedjisme était une sorte de
puritanisme égalitaire et farouche; il proclamait
l'égalité absolue entre tous les musulmans, qu'ils fussent
arabes ou non arabes. L'idéal de gouvernement des
Kharedjites, républicains et démocrates, était un chef
élu, sans cesse surveillé et toujours responsable devant
l'assemblée des fidèles. Les indigènes embrassèrent avec
passion les doctrines de cette secte, dont les violences
répétèrent, à plusieurs siècles de distance, les excès
des donatistes et des circoncellions. Ils y virent un moyen
de se révolter au nom d'Allah et de s'affranchir des
khalifes et de leurs gouverneurs.
Comme l'empire de Charlemagne, l'empire des khalifes, trop
vaste, se démembra |
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