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Don Juan d'Autriche reprit
Tunis en 1573, mais Euldj-Ali l'en chassa dès l'année
suivante; cette fois, la Goulette fut prise et la garnison
espagnole entièrement massacrée. Tunis, à partir de cette
date, resta définitivement à l'Islam et devint le
cheflieu d'un pachalik relevant du sultan : « Vous nous
avez rasé la barbe à Lépante, disait le grand vizir à
l'ambassadeur de Venise, mais nous vous avons coupé le bras
à Tunis; la barbe repousse, mais jamais le bras. »
Au Maroc, Euldj-Ali envoya une armée contre le chérif de
Fès, allié des chrétiens, et soutint un prétendant qui
promit d'aider les Turcs à chasser les Espagnols; mais
celui-ci fut tué à la bataille de Ksar-el-Kébir ou
bataille des Trois Rois. EuldjAli fut rappelé en Orient
au moment où il allait sans doute réaliser le rêve de
tous les beylierbeys en chassant les Espagnols d'Oran. Il
avait conçu le projet de percer l'isthme de Suez et
l'entreprise reçut même un commencement d'exécution. Il
avait tenté d'établir la puissance turque dans tout le
bassin occidental de la Méditerranée. Il mourut en 1587,
âgé de quatre-vingts ans. |
II |
LES
DIFFÉRENTES PHASES DE LA DOMINATION TURQUE |
La période turque de
l'histoire de l'Algérie se divise en quatre phases : celle
des beylierbeys (1518-1587), celle des pachas triennaux
(1587-1659), celle des aghas (1659-1671), celle des deys
(1671-1830). Il y a là plus qu'un changement de titre; ces
diverses phases correspondent à un détachement croissant
vis-à-vis du sultan de Constantinople et aussi à une
anarchie de plus en plus complète.
Depuis qu'Aroudj et Kheir-ed-Din avaient fondé la Régence
d'Alger, ou, comme on disait, l'Odjak, quatre grands
personnages avaient été revêtus de la dignité de
beylierbey : Kheir-ed-Din lui-même, son fils Hassan,
Salah-Raïs et Euldj-Ali ; les uns et les autres avaient
été des hommes remarquables par leur énergie et leur sens
politique. La milice et les corsaires leur obéissaient et
ils étaient eux-mêmes de fidèles serviteurs du sultan.
Mais déjà des révoltes fréquentes avaient appris aux
fondateurs de la Régence que leur oeuvre n'était guère
solide et que la turbulence des janissaires constituait pour
elle un perpétuel danger. Dès 1556, la milice égorgeait
un pacha; en 1561, elle embarquait de force pour la Turquie
Hassan-ben-Kheir-ed-Din. Le pacha, quand on voulait bien
l'accepter, ne pouvait rien sans l'assentiment de l'agha,
chef des troupes et de l'assemblée du Divan où tous les
janissaires avaient accès. Cependant, jusque vers 1587, les
beylierbeys |
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