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Malgré les pillages, la maladies
et les misères, les colons avaient réussi à s'implanter
solidement dans tous les territoires dont l'accès ne leur
était pas formellement interdit, dans le domaine très exigu
qui nous était reconnu par le traité de la Tafna, au
voisinage d'Oran, d'Arzew, de Mostaganem, d'Alger, de Bougie
et de Bône. Le maréchal Valée avait fondé Philippeville,
destinée à devenir le port de Constantine, dans la baie de
Stora. Mais c'est surtout dans le Sahel et la Mitidja que l'œuvre
fut réellement remarquable; de cette époque datent, dans le
Sahel, Dely-Ibrahim, Birkadem, Husseïn-Dey, Mahelma, Cheraga,
El-Biar, Staouéli, Douéra; dans la Mitidja, Boufarik,
Beni-Mered, l'Arba, l'Harrach ; 8 000 hectares de terre
avaient été mis en culture, dont près de 7 000 dans la
région d'Alger; 64 000 oliviers avaient été greffés, 327
000 arbres plantés, dont 87 000 mûriers. On faisait surtout
des céréales et de l'élevage; cependant on avait déjà
planté un peu de vigne et fait quelques essais de coton. De
décembre 1835 à mars 1836, plus de 2 000 colons
débarquèrent à Alger; le ministre de la Guerre était
assailli de demandes. A la fin de 1839, la population
européenne de l'Algérie s'élevait à 25 000 habitants, dont
11 000 Français; il y avait 14 000 Européens à Alger, 5 000
à Oran, 3 000 à Bône, le surplus se partageant entre
Bougie, Mostaganem, Constantine et Philippeville. Les
Français dominaient à Alger (6 800), les Espagnols à Oran
(2 300), les Maltais à Bône (1300), marquant déjà une
répartition géographique qui devait se continuer par la
suite. La population rurale atteignait 2 600 individus. Les
importations atteignaient 36 millions, les exportations 5
millions; chiffres bien modestes encore, mais en progression
constante. Le problème de la colonisation algérienne
paraissait résolu. |
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L'INSURRECTION DE
1839 |
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De tous les efforts de cette
vaillante génération, il rie devait rester que peu de traces
; dans la Mitidja notamment, leur oeuvre allait être
complètement anéantie. Le 3 novembre 1839, Abd-el-Kader
écrivait au maréchal Valée qu'il considérait l'expédition
des Portes-de-Fer comme une rupture : " Pour que vous ne
m'accusiez pas de trahison, ajoutait-il, je vous préviens que
je vais recommencer la guerre. Préparez-vous donc, prévenez
vos voyageurs, vos isolés, en un mot prenez toutes vos
précautions comme vous l'entendrez." La rupture prit
cependant le gouverneur au dépourvu. Il croyait encore à la
paix et envoya Ben-Durand à Médéa porteur d'une lettre pour
l'émir. Celui-ci tint conseil avec ses khalifas, qui se
prononcèrent pour la guerre. Resté seul avec BenDurand,
Abd-el-Kader lui dit : " Les khalifas veulent la guerre.
Le peuple me traite de kafir parce qu'elle n'est pas encore
commencée ; les Français en sont la cause, je ne la
désirais pas ". |
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