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  LA CONQUÊTE INTÉGRALE - BUGEAUD ET ABD-EL-KADER (1840-1848)  
     
  
Mais, comme en 1839, les Kabyles refusent de prendre parti dans la querelle et de s'associer à une cause qui leur semble perdue. Mal accueilli par eux, Abd-el-Kader rétrograde peu à peu vers le Maroc, après avoir failli plusieurs fois être pris.
La grande insurrection de 1845-1846 démontra aux indigènes, tant aux fanatiques qu'aux politiques, l'inutilité de leurs efforts; elle nous enseigna une fois de plus à ne pas cesser d'être sur nos gardes; elle consolida notre domination et lui donna plus de cohésion. Ce fut la campagne la plus difficile et la plus pénible qui ait été faite en Algérie, bien qu'il ne s'y soit livré aucun combat de grande importance. Des marches, des contremarches, des fatigues écrasantes, des efforts inouïs furent imposés à toutes les colonnes; les généraux Comman et Géry moururent d'épuisement; nulle part on n'eut à lutter avec l'ennemi, qui demeurait insaisissable et invisible.
Malgré les veilles et les fatigues, le gouverneur, grâce à sa forte organisation physique et morale, conserva son calme et sa sérénité. Quand il rentra à Alger avec une capote militaire usée jusqu'à la corde, entouré d'un état-major dont les habits étaient en lambeaux, marchant à la tête d'une colonne de soldats bronzés, amaigris, aux figures résolues et portant fièrement leurs guenilles, la population lui fit un accueil enthousiaste.

Pendant cette poursuite, la Deïra d'Abd-el-Kader, résidu de la Smala, autour de laquelle venaient se grouper les mécontents, les émigrés, les déserteurs, tous les ennemis de la France, était demeurée campée à la frontière marocaine. Dans la nuit du 26 au 27 avril, 270 prisonniers français y furent égorgés. Abd-el-Kader s'est toujours défendu d'avoir ordonné ce massacre; c'est son khalifa Mustapha-ben-Thami qui doit en porter la responsabilité. Abd-el-Kader, on l'a dit, en faisant des prisonniers, avait agi contrairement aux usages de sa religion et de son milieu, l'habitude des indigènes, dans les guerres avec les chrétiens, étant de décapiter et de mutiler ceux qui tombaient entre leurs mains. Les prisonniers étaient une gêne parce qu'ils exigeaient une garde et que les vivres faisaient défaut.
Ben-Thami voulut aussi de cette façon donner un gage aux fanatiques et empêcher la désagrégation de la Deïra, que plusieurs fractions avaient déjà quittée.

Chasseurs à pied (d'après Detaille).
 
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