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  L'ALGÉRIE DE 1870 à 1890  
     
  
Les promesses de réorganisation politique et administrative, les perpétuels changements d'orientation avaient fatigué et surexcité les esprits, en discréditant le régime militaire sans parvenir à le remplacer. Les conseils municipaux et les Comités de défense entrèrent en lutte avec les agents militaires ou civils du gouvernement central et avec ce gouvernement lui-même; ce fut un pêle-mêle orageux d'opinions, de tendances, de résolutions diverses.
 

LES TROUBLES INTÉRIEURS (1870-1871)

 
La République fut proclamée en Algérie sans troubles graves. La population européenne salua son avènement avec joie; l'Empire avait en Algérie de sérieux et redoutables adversaires; seule, avec la Seine et les Bouches-du-Rhône, elle avait voté non au plébiscite. Les indigènes accueillirent la nouvelle de la révolution avec une surprise mêlée d'inquiétude. Surtout la nouvelle de la captivité de l'Empereur émut vivement les grands chefs; les musulmans incarnent un peuple dans le sultan que Dieu a mis à sa tête; l'Empereur vaincu et prisonnier, c'était pour eux l'anéantissement de la France.
Le général Durrieu, gouverneur général par intérim, écrivait au ministre de la Guerre : " Les derniers revers de l'armée réclament le maintien de l'ordre en Algérie; le spectacle du désordre ébranlerait fortement les indigènes en leur enlevant la confiance dans notre gouvernement. " Le docteur Warnier, nommé préfet d'Alger en remplacement de M. Le Myre de Villers, était estimé de tous et connaissait de longue date les questions algériennes : " Aucune agitation, même innocente, disait-il dans sa proclamation, ne peut se produire parmi nous sans avoir son contre-coup dans l'intérieur. " A Oran, M. Brosselard fut remplacé par M. du Bouzet, rédacteur du Temps, ancien professeur de philosophie au lycée d'Alger, publiciste distingué et homme des plus honorables. A Constantine, M. Toustain du Manoir fit place à M. Lucet, ferme et conciliant, qui habitait le pays depuis longtemps et y jouissait d'une certaine popularité. Mais bientôt le gouverneur général et les préfets rencontrèrent des difficultés sérieuses, provenant des excitations de la presse, de l'effervescence d'une partie de la population et surtout de l'ingérence des conseils municipaux et des Comités de défense dans leurs attributions administratives.
Les Comités de défense étaient issus de l'idée que, par suite de la révolution, tous les pouvoirs anciens étant abolis, le droit d'initiative était ouvert à chacun des citoyens. Ils envoyèrent des délégués à Tours, chargés de presser la substitution du régime civil au régime militaire et de demander que les troupes qui se trouvaient encore en Algérie en fussent éloignées.
 
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