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moines et par des prêtres démontrent assez quel excellent parti l'on pourrait tirer de ce sol au moyen d'un travail habilement dirigé.
 
Trappiste défrichant.
 

Le sujet de la colonisation française en Algérie ne parait pas avoir été bien compris jusqu'à ce jour ; mais, tandis qu'il n'est pas difficile de trouver à redire à l'état inculte où sont encore les trois quarts de ce beau pays, il n'est pas si facile d'y apporter remède. Les uns attribuent le mal au gouvernement militaire de la colonie ; on ne doit pas oublier cependant que I'Algérie a été conquise graduellement sur les Arabes, et qu'une autorité purement civile ne se ferait pas respecter par ces tribus belliqueuses, dont l'idéal de la puissance consiste dans une artillerie plus on moins imposante. " Ils se moquent d'un Français en habit noir, me disait, un jour un homme très intelligent, tandis que l'uniforme est pour eux un porte-respect. " D'un autre côté, les Français ont commis une erreur capitale en envoyant comme colons des hommes sans le sou, déclassés pour la plupart, perdus de santé et de réputation. Le gouvernement impérial a ensuite eu le tort de considérer l'Algérie simplement comme rare colonie pénitentiaire, où il était fort commode d'envoyer des condamnés politiques dont les délits n'étaient pas assez graves pour qu'on les déportât à Cayenne, et qu'on ne pouvait cependant pas garder en France, où leur présence était une menace permanente contre la sûreté publique. Ce fait explique suffisamment l'existence de l'élément révolutionnaire et communard dans ce pays, ainsi que la multitude de " cafés " et de " billards " que l'on rencontre à chaque pas, souvent en ruine, il est vrai, mais qui paraissent être les seuls établissements capables de fournir de l'occupation à ces sortes de gens. On ne peut nier 

    

 

   
toutefois que même les émigrés et les colons honorables ne rencontrent de grands obstacles, qu'on fait remonter à diverses causes. L'un d'eux attribue sa non-réussite aux impôts onéreux, aux prohibitions des douanes françaises et aux droits d'entrée exorbitants levés sur les vaisseaux étrangers. Les colons français, me disait-il, payent fort cher toutes les denrées et tous les articles qui ne sont pas un produit de l'Algérie, tandis qu'ils vendent avec une perte considérable tout ce qu'ils exportent, vu les droits de port, les frais de chargement et de commission, qui sont énormes. Des centaines de vaisseaux étrangers, ajoutait-il, passent outre devant les ports de la colonie, qui y entreraient volontiers pour trafiquer et faire un chargement, si ce n'étaient encore ces redevances ruineuses du port. D'autre part, un Anglais intelligent et très habile en affaires, qui fait valoir une grande ferme aux environs de Koléah, pense que l'on doit d'abord s'en prendre aux colons eux-mêmes ; que les droits d'entrée pour les machines à vapeur et les instruments aratoires, par exemple, se réduisent à fort peu de chose, et que lui-même en a importé une quantité considérable de l'Angleterre sans beaucoup de frais. Il dit aussi que le mal vient de ce que, lorsqu'un Français achète ou obtient une concession de terre, il ne s'y fixe jamais, mais loue sa propriété à un autre individu, qui la sous-loue à un troisième, de sorte que le premier propriétaire ne s'intéresse aucunement à sa terre, qui est censée devoir rapporter du profit à trois personnes au lieu d'une seule. M. M... ajoutait qu'il ne lui manquait absolument que des bras. Il fit d'abord venir quelques familles anglaises, et les installa confortablement dans sa nouvelle ferme. Malheureusement, la plaine de la Mitidjah, où elle se trouve située, est très insalubre à certaines époques de l'année : le premier de ces hommes mourut de la fièvre ; les autres, saisis d'une terreur panique, se découragèrent, et finalement toute la petite colonie repartit pour l'Angleterre. Il essaya alors d'employer des Arabes; mais ceux-ci, qui s'occupent volontiers du soin des bestiaux, ne veulent pas travailler à la terre. Aujourd'hui il emploie des journaliers français, auxquels il donne 25 francs par semaine, et des Espagnols comme terrassiers. M. M... regrette beaucoup que tous ces ouvriers n'entendes rien aux machines anglaises, qui suppléeraient 
 
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