Pages précédentes ALGÉRIE CONTEMPORAINE   TUNIS ET CARTHAGE Pages suivantes
  Retour page Table des matières  
   
  

Dans le " patio " ou cour intérieure, on nous régala d'un concert arabe donné par une trentaine des plus jolies esclaves du palais, toutes magnifiquement vêtues. Elles exécutèrent ensuite (toujours à notre intention) les danses les plus extraordinaires, se tortillant de telle sorte qu'on eût pu croire que l'estomac de la danseuse était indépendant du reste de son corps ; puis, à notre profonde surprise, cet exercice se termina par une série de culbutes dignes des petits saute-ruisseau de nos grandes villes. Quant à la fiancée, il ne nous fut pas donné de l'apercevoir, parce que l'étiquette musulmane exige qu'elle se renferme pendant les sept jours qui précèdent son mariage, et qu'elle soit invisible à tout le monde, même à son propre père.

 
 

Ce soir-là les femmes étaient très occupées : il s'agissait de préparer le " henné ", poudre végétale avec laquelle, à la veille de toutes les fêtes importantes, il est d'usage que les femmes se teignent les ongles des doigts et des orteils d'un jaune orange vif. Je regrettai beaucoup que notre prochain départ ne nous permît pas d'assister à toutes les cérémonies du mariage, car ce doit être comme une scène des Mille et une Nuits. Il ne faut pas cependant se faire illusion : le sort des femmes de ce pays est vraiment déplorable; elles ne connaissent d'autres occupations que de se baigner, s'habiller, fumer et manger ; c'est à peine si l'on en rencontre une qui sache lire ou écrire : aussi le temps leur pèse-t-il énormément, et le plus grand service que l'on puisse rendre à ces pauvres créatures, c'est de leur faire des visites, afin de les aider à tuer une ou deux de ces heures dont elles ne savent que faire. Elles sont dans une ignorance profonde de leur religion ; mais il nous fut bien difficile de déterminer ce qu'elles pensent sur quelque

    

 

   
sujet que ce soit, attendu que nous étions toujours obligées dans nos conversations de nous servir d'un trucheman. Quant à leur beauté, elle est vraiment remarquable : la princesse mère de la nièce du bey avait entre autres une physionomie noble et une distinction extrême, qui n'auraient point déparé une cour européenne ; sa belle-sœur, femme d'un autre bey, était aussi fort belle et surchargée de bijoux superbes.
 
Tunis. - Bazars faisant face à ma fenêtre.
 

Le palais de Goletta n'a rien d'intéressant ; mais en revanche le bey possède aux portes de Tunis une habitation princière, le " Bardo ", où l'on admire un bel escalier de marbre, flanqué de huit lions également de marbre ; les cloîtres et les plafonds sont revêtus de ce stuc si original dont j'ai déjà parlé, et les arcades sont composées de marbre blanc et noir. Dans la salle du trône, 

 
Pages précédentes   Retour page Table des matières   Pages suivantes