subissais moi-même le charme de
ce lieu paisible, qui contraste si agréablement avec la route
poudreuse qui y conduit, où l'on est à moitié rôti par le
soleil et aveuglé par la réverbération.
Au sommet d'une colline escarpée qui domine le golfe
d'Alger jusqu'au cap Matifou, auprès du village de Koubba,
s'élève le grand séminaire, ainsi qu'un collège pour ceux
des enfants arabes, recueillis pendant la famine, qui montrent
des dispositions pour les lettres. Un vieillard vénérable
nous fit visiter tous les bâtiments. L'église n'est pas
encore achevée, mais son immense dôme blanc s'aperçoit de
tous les points de l'horizon. Nous n'eûmes pas le temps de
nous rendre à un orphelinat dirigé par les sœurs de la
Sainte-Enfance pour les filles. Nous revînmes par la gorge de
la Femme-Sauvage, en passant par le joli village du Ruisseau.
Les environs d'Alger sont riches en excursions charmantes,
qu'on peut faire à pied ou à cheval.
Le lendemain, nous fîmes trêve à nos promenades, afin
d'assister à un mariage juif, en compagnie de Mme de C. et de
sa ravissante fille. Cette dame avait eu la complaisance de
nous procurer une invitation pour cette intéressante
cérémonie. On nous introduisit dans une pièce à alcôves,
où un déjeuner de sucreries, de gâteaux et de vins doux
était servi. La fiancée était assise sur un divan entre son
père et sa mère ; tous les trois portaient le riche costume
israélite. Au bout de quelques instants donnés à la
conversation, on nous avertit de précéder la jeune fille aux
" bains mauresques " : ainsi le voulait
l'étiquette. Mais je désespère de pouvoir rendre la scène
extraordinaire, qui s'offrit à nos yeux.
Au milieu de la salle de bains, une cinquantaine de jeunes
filles juives se tenaient debout dans l'eau, enveloppées d'un
nuage de vapeur et d'encens, ayant pour tout vête ment une
écharpe de gaze d'orou d'argent autour des reins. Leurs beaux
cheveux noirs flottaient sur leurs épaules ; leurs cous et
leurs bras blancs étaient couverts de colliers et de
bracelets. Elles attendaient la fiancée. Dès qu'elle parut,
elles la saluèrent par des cris aigus : "Li ! li ! li!
"
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