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nous distinguions le son des tam-tams1, des tambourins et des autres instruments de musique. Nous franchîmes une porte basse, et nous nous trouvâmes dans la cour d'une maison mauresque. Les musiciens étaient rangés d'un côté, tandis que les marabouts étaient gravement assis en demi-cercle de l'autre. On était dans l'obscurité : un feu allumé an milieu de la cour jetait seul quelques lueurs vacillantes. Sur le balcon d'en haut se pressaient toutes les femmes de l'habitation, complètement voilées des pieds à la tête, il est vrai, mais non moins excitées que les hommes. On servit d'abord du café.
 
Aiguiseur d'armes en temps de troubles.
 
On nous plaça dans un coin de la cour ; puis les musiciens commencèrent à jouer du tambourin de plus en plus vite, tandis que deux hommes s'avançaient en dansant tout comme les derviches tourneurs que nous avions vus au Caire ; ils se retirèrent au bout de quelques instants, revinrent toujours plus excités, jusqu'à ce qu'ils se missent à sauter en l'air comme des forcenés, à rugir comme des chameaux, à avaler d'énormes bouchées de serpents, de scorpions et de feuilles épineuses de cactus, enfin à se comporter comme des brutes ou des possédés du démon. Ces deux hommes furent remplacés par deux individus qui firent chauffer des barres de fer sur un brasier ; quand elles furent 
 

1. Cet instrument, d'origine chinoise, rend un son effrayant. On l'entendit à Paris pour la première fois aux funérailles de Mirabeau. Dict. de Littré. (Note du traducteur.)

    

 

   
rougies au feu, ils les plièrent avec leurs mains, et s'en brûlèrent la plante des pieds et d'autres parties du corps. L'odeur de la chair grillée ajoutait encore à l'horreur de ce spectacle barbare.
 
Nous franchîmes la porte basse d'une maison mauresque.
 
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