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   comportaient la capture de nombreux prisonniers Les populations avaient le choix entre la conversion et l'exil ou la mort. La conversion s'accompagnait en principe de l'acquisition des droits communs à tous les musulmans, notamment la dispense de la capitation (jiziya) et de l'impôt foncier (kharadj). Ce procédé fut employé systématiquement à partir de 718.
Cependant, et l'exemple de Kossayla le montre encore, en dépit des avantages acquis aux nouveaux convertis, les conversions n'étaient pas toujours durables. Suivant un texte célèbre, les Berbères apostasièrent douze fois en 70 ans. C'est alors qu'intervint à leur profit l'application d' un autre principe de la guerre sainte : les territoires nouveaux, soumis par les armes, restaient la possession des conquérants. C'est ainsi que, mêlant la foi à l'intérêt, les Berbères furent lancés à la conquête de l'Espagne.

Ceux qui restèrent en Afrique du Nord, et en Algérie, furent contraints d'accepter la domination arabe, qui, outre la religion, comportait l'adoption de la langue du vainqueur. Ce nouveau changement linguistique fut admis sans plus de difficulté et dans les mêmes conditions que les changements antérieurs : les sédentaires et les gens des villes s'y plièrent aisément; les montagnards des massifs difficiles à réduire continuèrent à parler leur langue. Néanmoins l'islamisation de l'Algérie connut des débuts rapides.

 

II

Le Royaume de Tahert (VIII-IXème siècles)

Le royaume de Tahert est le premier État indépendant qui se soit formé sur le territoire de l'Algérie musulmane. Sa constitution a trouvé en partie son origine dans un mouvement berbère dirigé contre l'occupant arabe. Mais elle ne représente rien qui puisse se comparer à une réaction contre l'Islam triomphant. Au contraire, son fondateur appartenait à une secte qui se piquait de rétablir l'islamisme dans toute sa pureté originelle.
Au début du VIIIème siècle, à l'époque où l'Islam s'affermissait en Afrique du Nord, les causes de malentendus entre Arabes et Berbères étaient nombreuses. Ceux-ci

      

auraient accepté la domination de ceux-là si les nouveaux maîtres n'avaient ouvertement marqué leur dédain pour les populations conquises, dédain que ne compensaient pas des bienfaits matériels dus à l'administration du territoire.
La politique des gouverneurs qui régnaient sur les pays au nom des Khalifes ne paraît pas avoir été non plus très habile. La faute ne leur incombe peut-être pas personnellement, mais elle eut des conséquences graves. Pour mener la guerre sainte, l'Islam avait besoin d'argent. Ce besoin devint bientôt si pressant que, adoptant un expédient déjà utilisé ailleurs dans l'empire musulman, mais contraire aux règles normales de l'Islam, le représentant du Khalife décida que les nouveaux convertis auraient, même après leur conversion, à payer la capitation et l'impôt foncier.

Le mécontentement grandit vite et aboutit à l'assassinat du gouverneur Yazid, suivi de révoltes sur plusieurs points et pendant une période assez longue.

Les Arabes, en effet, étaient divisés entre eux. Le grand effort de Mahomet, on le sait, avait eu d'abord pour but de faire l'unité entre les différentes tribus. Maintenue dans la guerre sainte, pour elle et par elle, cette unité tendit rapidement à s'affaiblir, Les Arabes installés en Afrique du Nord n'avaient pas entièrement perdu le souvenir des haines qui avaient longtemps armé leurs tribus les unes contre les autres. L'installation des Khalifes à Bagdad, en éloignant le pouvoir central de l'Afrique du Nord, laissait le champ libre à ces dissensions intestines auxquelles les Berbères se trouvèrent mêlés.

Un mouvement populaire, pour être redoutable, doit avoir pour substrat une grande idée. Les exactions des gouverneurs n'auraient pas suffi sans l'influence du Karidjisme. Rappelons brièvement les origines de cette secte.

Ali, quatrième successeur du Prophète, dont il avait épousé la fille aînée Fatima, avait été élu par les gens de Médine (656), ce qui lui valut l'inimitié des gens de la Mecque. Ceux-ci cherchèrent des appuis; le principal adversaire d'Ali fut le gouverneur de Syrie, Moawya, de la famille des Ommeya, soutenu par la « Mère des fidèles », Aicha, la femme favorite de Mahomet. La lutte entre Ali et Moawya enraya les conquêtes de l'Islam Dans le camp même d'Ali, l'unité ne dura pas; en face des gens de son parti (Chia), légitimistes ne voulant reconnaître le droit au Khalifa qu'à lui et à ses descendants parce qu'ils étaient du sang du Prophète, se dressèrent des musulmans qui entendaient rester fidèles aux principes fondamentaux de l'Islam démocratique et égalitaire, en particulier

 
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