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III

L' État Hammadite (Xème-XIIème siècles)

Les hérésies jointes aux ambitions personnelles continuaient à ébranler l'Islam en le morcelant. Tahert, née dit Kharidjisme, périt par le Chiisme.

La Chia légitimiste du quatrième Khalife, Ali, appelait au pouvoir ses descendants, les Fatimides. Les Chiites vivaient dans l'espoir d'un Mahdi et se livraient en sa faveur à une ardente propagande. Un de leurs émissaires, Abou Abdallah, crut discerner les instruments de Dieu dans les Kotamas, montagnards de la Petite Kabylie. De fait, ceux-ci réussirent à prendre Kairouan, Tahert (909) et à ramener à Kairouan un Mahdi Fatimide, alors prisonnier chez un prince kharidjite du Tafilalet.

Ce fut l'origine de nouvelles luttes. Les Algériens furent englobés dans la rivalité entre les Ommeyades de Cordoue et les Fatimides de Kairouan, et se divisèrent pour suivre le parti de ceux-ci ou de ceux-là. Aux Kotamas Chiites se joignirent les Senhadja, sédentaires de l'actuel département d'Alger, s'étendant jusqu'au Hodna, qui se rallièrent aux Fatimides; leur principal ennemi était le bloc des Zenata, nomades ayant leurs terrains de parcours plus à l'ouest et au sud, fidèles aux Ommeyades. Les Senhadja, et au premier rang les Beni Ziri, l'emportèrent.

Les Beni Ziri s'occupèrent alors de faire régner la sécurité sur leur territoire. Ils y arrivèrent en bâtissant des forteresses, dont la principale, Achir, dans les Monts du Tittery, devint leur capitale.

Ils restèrent fidèles aux Fatimides et allèrent les soutenir en Ifriqya. Les nouveaux maîtres de Kairouan n'avaient pas tardé, pour subvenir aux besoins de la guerre, à lever des impôts non coraniques. D'où leur impopularité, qui trouvait un autre aliment dans le ressentiment des Kharidjites et des Malékites. Une révolte se produisit chez les Berbères, menée par Abou Yazid, l'homme à la chèvre, qui, ayant étudié à Tahert, rêvait de chasser les Fatimides et d'établir un régime théocratique. Il en résulta une crise grave qui dura de 943 à 947. Abou Yazid marcha sur Kairouan, puis sur Mahdiya, port construit sur la côte tunisienne où se réfugièrent les Fatimides. Les Beni Ziri délivrèrent la ville, poursuivirent Abou Yazid, et le prirent dans les hauteurs dominant le Hodna.
      

Le projet des Fatimides était de répandre le Chiisme en Orient, et d'abord en Égypte. Après un premier échec, ils reprirent leur dessein. Pour assurer leur liberté de mouvement, ils confièrent l'Ifriqya à Bologguin, fils de Ziri. Tout en tenant leur place, celui-ci devait continuer la lutte contre les'Zenata. Tâche écrasante, que son fils désespéra de mener à bien : à son tour, usant du même procédé que les Fatimides, il abandonna une partie de son territoire, le Maghreb central, à son oncle Hammad, avec mission de contenir les Zenata, lui-même s'installant à Kairouan.

Hammad ne tarda pas à vouloir se rendre indépendant. Il fonda dans les hauteurs du Hodna la Qala des Beni Ziri, qui, à l'origine simple forteresse, se développa et devint une véritable capitale. En 1017, après une guerre, le sultan de Kairouan dut reconnaître l'indépendance de l'État Hammadite.

La Qala, peuplée d'abord grâce à des déportations en masse, connut une grande prospérité. Cette prospérité, certaine et brillante, mais éphémère, lui vint en partie de ce qui devait causer sa ruine et celle de l'Algérie : l'invasion des Arabes hilaliens. Les Senhadja de Kairouan, dont les convictions chiites étaient devenues assez tièdes, n'avaient pas tardé à rompre avec le Fatimide d'Égypte. Occupé de ses projets orientaux, celui-ci lança contre eux les nomades hilaliens, alors cantonnés dans la Haute-Egypte. Le sultan de Kairouan les accueillit d'abord favorablement; mais ils ne tardèrent pas à être les maîtres. Les Beni Ziri durent abandonner Kairouan, pour se retirer, comme avant eux les Fatimides, à Mahdiya.

La ruine de Kairouan profita d'abord à la Qala Hammadite. Un flot d'émigrés vint augmenter sa population. Il en arriva même d'Égypte et de Syrie, du Hedjaz, et de l'Irak L' Émir En Nacir put ainsi faire de la Qala une capitale, avec dés monuments très importants (Palais du Fanal, Palais de la Mer), aussi remarquables par leurs proportions architecturales, que par leur décoration.

Mais l'invasion hilalienne continuait : sans cesse de nouvelles tribus arrivaient, et les nomades poussaient de l'avant, détruisant tout sur leur passage : à leur tour, les Hammadites durent céder la place, ou tout au moins chercher un refuge sur la côte. En 1090, El Mançour se réfugia à Bougie. Il n'était pas, à vrai dire, complètement chassé de la Qala, et, pendant un certain temps, les Hammadites eurent deux capitales.

Ils firent de Bougie une ville florissante. Sous la pression des circonstances, ces terriens se tournent vers la mer.

 
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