Pages précédentes CAHIERS DU CENTENAIRE DE L'ALGÉRIE LIVRET 1 L'ALGÉRIE jusqu'à la pénétration saharienne Pages suivantes
- 52 - Table des matières - 53 -
   
   à la Porte d'intervenir pour mettre Hussein à la raison, on lui avait laissé clairement entendre qu'on ne pouvait rien. A la dernière minute, cependant, un envoyé de la Porte, Mohammed Taher, se présenta en « pacificateur et conciliateur » à Toulon : c'était la veille du départ de l'expédition; il ne put rien obtenir; l'impuissance de Constantinople était démontrée.

De quelles ressources disposait le Dey ?
Pratiquement la flotte algérienne n'existait plus. Mais la ville était bien défendue sur le front de mer par une artillerie puissante. La situation était moins brillante sur le front de terre où un seul ouvrage était la clé de la position (le Fort l'Empereur, Sultan-Khalessi).

Les forces de terre paraissaient plus sérieuses. Elles comprenaient la milice turque (15 à 20.000 hommes au total), les Coulouglis (descendants de Turcs et de femmes indigènes), un certain nombre de tribus maghzen dévouées aux Turcs. En fait, lors du débarquement, les troupes françaises eurent à faire à 5.000 janissaires, 5.000 Coulouglis, 10.000. Maures algériens, 30.000 Arabes des beyliks du Tittery, d'Oran et de Constantine, commandés par l'Agha Ibrahim.

La principale défense d'Alger était encore, dans l'opinion générale, bien plus que dans celle des militaires et des marins français, le renom d'invincibilité que lui avaient valu les retentissants échecs des Européens dans le passé, celui de Charles-Quint au XVIème siècle, celui d'O'Reilly au XVIIIème.

Ce renom bien établi semble avoir été la raison qui amena les Anglais à se contenter de protester sans agir. Le duc de Wellington déclarait à la Princesse de Lieven « Les Français sont fous, un revers effroyable les attend sur la terre d'Algérie ».

Le plan d'opération définitif du général de Bourmont était fondé sur une appréciation exacte de la situation et des possibilités stratégiques, due aux reconnaissances déjà faites, entre autres celles du commandant Boutin sous le Premier Empire. Attaquer directement Alger par mer, tenter de débarquer à proximité immédiate, eût été une folie. Il fallait débarquer à quelque distance, de façon à attaquer par terre : c'est ce qui eut lieu en effet.

Les embarquements de l'armée avaient commencé à Toulon le 11 mai:, ils étaient achevés le 17. L'escadrille
      

de débarquement partit pour Palma. Mais, attendant des vents favorables, l'amiral Duperré laissa la flotte au mouillage une longue semaine, ce qui imposa aux troupes des fatigues sérieuses.

Le 25 mai, enfin, la flotte mit à la voile. Elle arriva en vue d'Alger le 31. Bien qu'il eût, deux jours plus tôt, envoyé l'ordre à l'escadrille de quitter Palma et de rallier l'armée navale, Duperré estima que les éléments étaient contraires. La houle lui parut de nature à empêcher -les opérations de débarquement. Bourmont ne jugea pas le moment venu de faire état de son instruction spéciale et admit que la flotte se dirigeât sur Palma.

Elle séjourna sur rade jusqu'au 10 juin, tandis que les Turcs cherchaient à accroître leurs forces en appelant aux armes toute la population de la Régence, en essayant d'entraîner le bey de Tunis, qui ne se prononça pas contre nous, et le bey de Tripoli, qui parla de faire prêcher la guerre sainte dans les mosquées.

Enfin, le 10 juin, la flotte quitta Palma. En vue d'Alger quelque hésitation se marqua à nouveau. Cette fois Bourmont fut énergique et insista pour débarquer.

Le point choisi était la baie de Sidi-Ferruch, à 25 kilomètres à l'Ouest d'Alger. Cette baie présentait une plage de sable d'abord facile, bordée de batteries de défense et flanquée au Nord-est par la péninsule de Torretta Chica, portant une tour carrée et un fortin.
Le 14 juin, à 4 heures du matin, l'opération, qui avait été plusieurs fois répétée à Toulon avant le départ, commença. En une heure, toute la 1ere division eut débarqué et fut suivie de la seconde. Bourmont prit terre à 6 heures 1/2 et ordonna d'enlever les batteries. Celles-ci, prises sous le feu de l'artillerie navale dès le début de l'opération, tombèrent aux mains de la brigade Poret de Morvan (3B de ligne, 2e et 4e légers) à 11 heures.

En fin de journée, les troupes françaises, qui avaient pris 13 canons et 2 mortiers, occupaient une position en arc de cercle englobant la plage et la presqu'île. L'ennemi n'avait réagi que tardivement par d'infructueuses charges de cavalerie. Le génie commença la construction d'un camp retranché.

Bien qu'il eût hâte d'arriver au but, Bourmont était obligé d'être prudent. Le moindre échec pouvait être fatal et il fallait attendre le convoi laissé à Palma et transportant le matériel de siège. Il n'arriva que le 28 (Bourmont

 
Pages précédentes   Table des matières   Pages suivantes