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   le duc de Rovigo (Savary), qui lui-même, en avril 1833, céda la place au général Voirol. Ces changements continuels empêchèrent l'action méthodique et à larges vues qui eût été nécessaire.

Dans la province d'Oran, le Tunisien Achmet n'avait pu se maintenir : il évacua Oran à la fin d'avril 1831. Le sultan du Maroc en profita immédiatement. Avec l'aide de deux chefs des tribus Douairs et Srnela, qui, après avoir développé une savante propagande, lancèrent leurs cavaliers en avant, des représentants d'Abd er Rahman furent installés à Médéa (que les Français avaient dû abandonner) et à Miliana. Un Marocain, Bel Amri occupa Mascara. A Tlemcen, le premier gouverneur marocain avait échoué complètement. Mahi ed Din, appelé en médiateur, prit le titre de Khalifa du Sultan du Maroc, la garnison turque se maintenant toujours au Méchouar comme dans la citadelle de Mostaganem.

Il importait de mettre un terme à l'action du Maroc. Un bataillon de renfort débarqua à Oran le 17 août. Le mois suivant, un chef énergique, le général Pierre Boyer, fit rentrer dans leurs tribus les cavaliers Douairs et Smela. Une démonstration navale devant Tanger (novembre 1831), l'envoi d'une ambassade à Meknès (mars 1832) amenèrent Abd er Rahman à renoncer à ses prétentions. Ses représentants, y compris Mahi ed Din, abandonnèrent les pouvoirs qu'ils s'étaient arrogés. Par la suite, les Français occupèrent Arzeu et Mostaganem.

Dans les autres parties de l'Algérie, il n'y avait pas d'amélioration sensible. Sous Savary, et après un échec en 1831, Bône fut prise par Yusuf et d'Armandy en mars 1832, et Bougie en octobre 1833. Mais l'intérieur du pays était livré à une complète anarchie, les rivalités entre les tribus, entre les descendants des Marabouts et les chefs de guerre, entretenant le désordre.

Il restait encore en fonction un bey turc, Ahmed, à Constantine. En juillet 1830, Bourmont avait songé un moment à lui donner l'investiture de la France. Mais Ahmed pensait pouvoir s'assurer l'indépendance et restait maître de la plus grande partie de son beylik, où il croyait difficile, sinon impossible, une campagne des troupes françaises. Il songeait même à s'étendre vers l'ouest et jetait ses regards vers le Tittery.

C'est cependant encore dans la province d'Oran que les événements retenaient le plus l'attention. Les villes où nous tenions garnison étaient en fait bloquées. Mahi ed Din avait groupé autour de lui, cette fois en son nom,
      

et non pas comme Khalifa d'Abd er Rahman, tous ceux des indigènes qui voulaient lutter contre nous.

Au mois d'avril 1832, il avait été proclamé chef de la guerre sainte au cours d'une réunion tenue par les principaux chefs de la région de Mascara. Dès le 17, il avait attaqué une reconnaissance française, à peu de distance d'Oran, et, le 1er mai, sommé la garnison de se rendre. Il lança alors l'appel à la guerre sainte et attaqua Oran le. 3 mai. Dans ce combat, Abd el Kader fut sur le point d'être pris. Mahi ed Din renouvela l'attaque le 4. Le 6, douze mille guerriers des tribus étaient réunis, mais ils se dispersèrent pour la fête de l'Aid-el-Kébir (11 mai).

Le blocus d'Oran était maintenu. Cependant les premiers essais de politique indigène s'ébauchaient dans la région. Les Français étaient entrés en conversation avec les Douairs et les Srnéla ç mais une grave erreur avait été commise par le général Boyer qui avait répondu négativement à une démarche des cheikhs des anciennes tribus maghzen demandant qu'un bey fût choisi parmi les principaux Turcs restés au Méchouar de Tlemcen.

De son côté, Mahi ed Din ne réussissait pas à faire l'unité autour de lui. Ses échecs devant Oran, renouvelés les 31 août, 19 septembre, 23 octobre, 10 novembre, lassaient ses partisans. Il dispersa ses contingents en leur donnant rendez-vous au mois de mai 1833.

L'étoile d'Abd el Kader, qui s'était distingué dans tous les combats, se levait à l'horizon. Le 21 novembre, il était proclamé sultan dans la plaine d'Eghris, et le 25 il faisait son entrée dans Mascara. Il n'accepta d'ailleurs que le titre d'émir, qu'il transforma par la suite en celui d Émir et Mouminin (commandeur des croyants).

Le général Boyer à Oran ne s'émut pas : le nouvel émir n'était reconnu, en dehors de sa propre tribu, les Hachem, que par les Beni Amer et les Gharaba ç il lui fallait chercher à consolider ses pouvoirs, à organiser une sorte de gouvernement, de façon à se procurer les ressources nécessaires pour la guerre sainte. La France allait lui en fournir les moyens, partie sans le vouloir, partie de propos délibéré.

En avril 1833, à la suite d'un dissentiment avec le duc de Rovigo, commandant en chef, le général Boyer, qui venait d'enlever Arzeu, quitta Oran, où il fut remplacé par le général Desmichels. Celui-ci déploya d'abord de l'énergie et occupa Mostaganem. La ville, attaquée par

 
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