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le conquérir. En arrière, et formant autant de réduits, Sebdou,
Saïda, Tagdempt, Taza, Boghar, la Zaouïa de Bel-Kheroub, Biskra.
Ce système de places lui fournissait des bases nombreuses,
comprenant des moyens de ravitaillement (céréales enfermés dans
les silos), grâce auxquelles il pouvait se rendre insaisissable, ce
qui était le moyen de sa stratégie. Il employait tactiquement un
procédé analogue en évitant la bataille rangée, et en harcelant
les colonnes.
La faiblesse de cette organisation était son manque d'unité
réelle. De très anciens souvenirs de rivalités entre familles et
entre tribus s'opposaient à l'unification. Jamais, d'ailleurs,
rappelons-le, avant la pacification française, l'Algérie n'a
formé une unité dans les limites qu'elle a atteintes et qu'a
tracées la tentative même d'Abd el Kader. On doit plutôt
considérer l'État d'apparence unitaire créé par l'émir comme
une confédération dans laquelle chaque khalifa était presque
indépendant de fait, la liaison résultant de la reconnaissance
d'un chef commun.
Les difficultés avec la France commencèrent à propos du Consul d'Abd el Kader
à Alger. Ben Duran décidément reconnu indésirable, l'émir
voulut le remplacer par le nommé Garavini, qui fut écarté par
Valée parce qu'il était déjà consul des États-Unis. Abd el Kader
se plaignit de ce refus. Niais l'affaire la plus grave était la
délimitation de la Mitidja vers l'est. Le traité disait: jusqu'à
l'Oued Kaddara et au delà. Rédaction contradictoire, d'où chacun
s'efforçait de tirer des conclusions favorables à sa thèse, les
Français pour maintenir les communications par terre entre Alger et
Constantine, Abd el Kader pour s'étendre vers l'Est. Le Maréchal
Valée prépara un projet de traité additionnel réglant le litige;
Abd el Kader refusa de le ratifier; mais le gouvernement français
le déclara valable, parce que signé du représentant de l'émir.
Celui-ci sentait venir la reprise des hostilités, à laquelle il se
préparait. Ses empiètements dans la province de Constantine
étaient autant de provocations contre les Français qui se
décidèrent à réagir. Le Maréchal Valée. confiant dans son
système de camps successifs pour tenir le pays. crut qu'un coup
d'audace pourrait intimider l'émir. Ce fut une simple
démonstration.
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Le Maréchal quitta Mila, le 18 octobre 1839, à la tête d'une
colonne de 4.000 hommes et accompagné du duc d'Orléans. Il
traversa le défilé des Biban (Portes de fer) le 28 (moyennant
paiement aux tribus d'un " droit de passage n) et rentra à
Alger le 2 novembre.
Abd el Kader, qui était décidé depuis le mois de juillet à
proclamer la guerre sainte à la première " violation n du
traité par les Français, trouva dans cette 'expédition le
prétexte souhaité. Il quitta Tagdempt le 1er novembre, écrivit
à Valée deux lettres, dont la seconde reçut une réponse
conciliante, et lança l'appel à la guerre sainte le 19.
Dès le 10, un officier supérieur français avait été tué dans
une embuscade tendue par les Hadjoutes; les 13 et 14 novembre, des
coups de feu avaient été tirés contre Blida. Le 20, la Mitidja
fut envahie et ravagée par les contingents de l'émir. Le
lendemain, 158 Français furent surpris et tués au camp de l'Oued
el Alleug.
L'effort de l'émir paraissait devoir se concentrer d'abord dans la
province d'Alger où 20.000 Français étaient disséminés dans
les postes et les camps sur lesquels Valée fondait sa sécurité.
Le système ne résista pas à l'épreuve. Valée évacua la
plupart des points occupés, ne maintenant de garnisons qu'au
Fondouk, à Kara Mustapha, à l'Arba, et à Blida. Mais il fallait
organiser des colonnes mobiles pour les ravitailler, procédé que
le Maréchal dut adopter, après s'être violemment élevé contre
lui auparavant.
Dans la province d'Oran, des attaques furent exécutées par les
partisans d'Abd el Kader contre Mazagran (13 décembre), contre
Arzeu (17 décembre), et des razzias des Gharaba contre les Douairs
et les Smela. Le 2 février 1840, eut lieu l'attaque de Ben Thami,
khalifa d'Abd el Kader, contre la redoute de Mazagran, défendue
par le capitaine Lelièvre et 123 hommes de la 10ème
compagnie du premier bataillon d'infanterie légère d'Afrique : la
résistance dura 5 jours, les assaillants durent se retirer.
L'héroïsme des défenseurs fut célébré peut-être avec quelque
exagération; mais l'opinion française surexcitée exigea une
action énergique.
Valée, renforcé, disposant de 58.000 hommes, dont 33.000 dans la
province d'Alger, se disposa à agir au printemps. Il résolut
d'occuper Médéa et Miliana, puis de se maintenir en liaison
permanente avec Mostaganem et Oran. 11 occupa les deux premières
villes ainsi que Cherchell, mais le ravitaillement amena toujours
de nouveaux combats.
L'état sanitaire des garnisons était des plus défectueux |
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