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   dans le marabout de Sidi-Brahim et tiennent contre tous les assauts : le 26, ils se font jour vers Djemmaa-Ghezaouet, mais se désunissent pour boire dans un ruisseau; quatorze d'entre eux rejoignent le poste; un seul, le caporal Lavayssière, a encore son fusil.
Le marabout de Sidi-Brahim, d'après Genêt.
L'effet produit dans toute l'Algérie fut immense : l'insurrection se généralisa. L'armée française semblait traverser une crise : un convoi de cartouches envoyé par Cavaignac qui commandait à Tlemcen capitula en rase campagne avec son escorte non loin d'Ain Temouchent le 27 septembre, devant Abd el Kader.

L'énergie de Lamoricière et de Cavaignac sauva l'Oranie et l'Algérie tout entière. Bugeaud débarqua à Alger le 15 octobre et agit immédiatement. Il mit sur pied jusqu'à 18 colonnes à la fois, opérant les unes sur le pourtour, les autres au centre. Devant cet effort, les insurgés ne tiennent pas : plusieurs Bou Maza sont défaits. En novembre, Abd el Kader, qui s'est porté vers le plateau du Sersou, doit s'enfuir vers le sud. Il tâche de se maintenir successivement dans les massifs montagneux qui ont toujours permis une résistance opiniâtre : il est chassé de l'Ouarensenis ; puis il s'élance du Djurdjura sur la Mitidja où il est arrêté de justesse; rejeté dans le Djurdjura, il n'est pas suivi par les Kabyles. Il se réfugie au Djebel-Amour, mais les OuladNaïls et les Harrar demandent l'aman au Français. En  
      

mai 1846, il se porte chez les Oulad Sidi Cheïkh : le colonel Renaud arrive à El-Abiod au début de juin. Abd el Kader s'enfuit à Figuig.

Pendant cette dure campagne, les prisonniers français de Sidi-Brahim et d'Ain Temouchent, gardés à la Deïra (smala très réduite) sur les bords de Moulouya, ont été presque tous massacrés en l'absence de l'émir. Les survivants, avec Courby de Cognord, sont mis en liberté contre rançon en novembre; quelques-uns dont le clairon de Roland avaient réussi à s'évader.

L'émir, coupé des révoltés algériens, s'entend avec Bou Maza, qui tente d'opérer dans Tittery. L'homme à la chèvre est à son tour pourchassé chez les Oulad Naïls, en janvier février 1847, et, après un nouvel échec dans le Dahra, se rend à Saint-Arnaud le 13 avril. La pacification de l'Algérie est en bonne voie quand Bugeaud, las des attaques dont il est l'objet au Parlement, rentre en France (5 juin 1847) après une courte campagne en Kabylie.
Son successeur, le duc d'Aumale, allait avoir l'honneur de recevoir la reddition d'Abd el Kader.

Celui-ci ne peut plus rien obtenir des Marocains qui entrent même en lutte avec lui et empêchent des contingents. algériens de le rejoindre : le sultan craint l'ambition de l'émir. Celui-ci est hors d'état d'agir : le Maroc est hostile, L'Algérie est maintenant bien gardée. Les deux frères de l'émir demandent l'aman. Lui-même tente de rentrer en Algérie, il passe la Moulouya en subissant des pertes élevées, mais tous les passages sont gardés. Après des tractations dans lesquelles on lui a promis qu'il pourrait se rendre en Orient, Abd el Kader fait sa soumission le 23 décembre 1847.

On sait que la monarchie de juillet et la Seconde République ne purent se décider à lui permettre de quitter le territoire français. C'est Napoléon III qui tint la parole donnée. Le 21 décembre 1852, l'émir arrivait à Brousse. Il acceptait pleinement la situation et employa toute son énergie à sauver les Français lors des émeutes de Damas en juillet 1860. Au reste, n'a-t-il pas écrit : « Si les musulmans et les chrétiens me prêtaient l'oreille, je ferais cesser leur divergence, et ils deviendraient frères à l'extérieur et à l'intérieur ».

 
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