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   Ils furent arrêtés dans leur marche sur Alger au village de l'Alma (22 avril). Mais l'insurrection gagnait. Tandis que Moqrani était vers Aumale, toute la Grande Kabylie était soulevée; le mouvement s'étendait aux tribus du Hodna, puis aux Beni Menacer, entre Cherchell et Miliana.

Le gouvernement français, qui avait pourtant à faire face en même temps à la Commune de Paris, put envoyer des troupes en Algérie avec un gouverneur général clairvoyant et décidé, l'amiral de Gueydon. Dès le 5 mai, Moqrani fut tué dans un combat sur l'Oued Soufflat, et son frère Bou Mezrag vit bientôt le plus grand nombre de ses partisans le quitter. La contre-offensive s'organisa en mai et juin, Tizi-Ouzou, Dellys, Dra et Mizan furent délivrés. Les derniers champions de la résistance furent battus à Icheriden. Haddad et ses fils se soumirent le 13 juillet. Bou Mezrag se réfugia dans le sud et ne fut capturé qu'en janvier 1872.

L'insurrection avait trouvé à son début des circonstances favorables, mais l'oeuvre accomplie depuis quarante ans avait déjà porté ses fruits : le mouvement resta presque entièrement localisé dans la province de Constantine. Dans celle d'Alger, il n'eut que peu de succès et n'en eut pas du tout dans celle d'Oran.
      

 

 

CONCLUSION

On a souvent abusé de la comparaison entre l'œuvre de Rome et celle de la France en Algérie. Le rapprochement peut cependant être fait, à condition de n'être pas poussé trop loin.

Comme la paix romaine, la paix française assure la sécurité et la prospérité du pays. Elle a mis un terme, dans ce qu'elles avaient de dévastateur, aux querelles de tribus, de clans et de familles; elle permet à chacun de profiter sans trouble des fruits de son travail. Ceux-ci se développent de plus en plus; il y a encore beaucoup à faire, et notre « politique de l'eau » n'est guère qu'à ses débuts, mais les statistiques du commerce extérieur sont probantes (1), et rendent éloquemment témoignage de l'oeuvre accomplie. Depuis cent ans, il y a eu des combats en Algérie, mais il y a eu aussi création de richesses.

Il y a cependant, entre l'Algérie française et l'Algérie romaine, des différences dont la principale est due à la politique de colonisation. Celle-ci a amené en Algérie des éléments européens d'origine très diverse, et le problème a été d'abord d'en faire un ensemble unitaire (ce qui a assez bien réussi), puis de faire vivre cet ensemble en bonne harmonie avec les indigènes.

Les Romains eux aussi, comme les Carthaginois, ont bien dû avoir une politique indigène. Mais ses bases n'étaient pas celles de la nôtre. Le considérable apport ethnique qu'ils n'ont pas réalisé, et que nous avons suscité. a posé un problème spécial et requis des solutions nouvelles. Problème d'autant plus complexe, solutions d'autant plus

(1) La moyenne annuelle des transactions de l'Algérie avec l'extérieur est passée de 25 millions dans la décade 1831-1840, à 1.724 millions dans la décade 1911-1920; le chiffre de l'année 1928 atteint 1.750 millions (ramené, comme celui de la décade 1911-1920, â la parité de l'or).

 
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