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   suffisamment rapide. Un excellent méhari, sur de grandes distances, fait en moyenne et même dépasse un peu 6 kilomètres à l'heure, à condition de l'exciter incessamment par un mouvement machinal et ininterrompu du pied ou de la cravache. Dans ces conditions, pour traverser le Tanezrouft en plein été, avec des animaux en bon état, j'ai vu soutenir pendant plusieurs jours un train de 70 kilomètres environ par jour, mais en marchant seize heures sur vingt-quatre. C'est assurément un maximum.
" Le petit trot, naturellement, donne de meilleurs résultats, un train de diligence algérienne, 9 ou 10 kilomètres à l'heure. Mais il fatigue beaucoup l'animal et il est déconseillé, sauf sur les courtes distances.
" Pratiquement le galop n'existe pas, la conformation du train de derrière le rend à peu prés impossible. On a vu quelques méharis, après un dressage savant, partir au galop de pied ferme, comme des chevaux. Ce sont des acrobates dont leurs propriétaires sont très fiers. En général le galop ne s'obtient qu'après de longs efforts, beaucoup de coups et de cris, en affolant l'animal, qui le soutient d'ailleurs pendant quelques foulées seulement. Cette allure chez le chameau est désordonnée, spasmodique, absurde; on dirait une quinte de toux, quelque chose d'anormal et de maladif.
" La seule allure vive est le grand trot. C'est celle de la fantasia, de la charge, des fuites désespérées ou des courriers chargés d'une mission urgente. Pour forcer le méhari à la soutenir il faut avoir recours à la torture, on lui gratte la chair à vif avec un crochet en fer. Précisément, j'imagine, parce que le grand trot est un résultat du dressage contrariant la nature, il est très dur pour le cavalier; il est violent, saccadé, irrégulier, ne comporte pas pour l'écuyer d'accommodation atténuant les secousses, comme en équitation le trot enlevé. Pour le supporter, le méhariste se comprime les viscères depuis l'estomac jusqu'au bas-ventre, avec une large ceinture; de là est venue peut-être la légende, des nausées, quoique l'incommodité éprouvée n'ait rien de commun avec le mal de mer. Il est d'ailleurs très facile de s'y soustraire en ne trottant point, la bête ne demande pas mieux: par caractère et par hygiène elle préfère le pas.
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" Il a été regrettable pour sa santé, dans ses rapports avec l'Européen, qu'on se soit fait des idées fausses sur ses capacités de coureur; on a pu, dans certains cas, se
       FROMENTIN. - Chameau et chamelier  
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