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   Ainsi, trois étapes marquent l'histoire démographique de l'Algérie depuis 1830 :
 
1830, 1 million et demi;
1856, 2.183.793 (la pacification est achevée depuis quelques années) ;
1926, 5.115.980 (1),
 
soit une augmentation moyenne de 200.000 tous les cinq ans (A. Bernard), soit encore un coefficient d'augmentation de 2,5 de 1872 à 1926, la population indigène ayant plus que doublé en ces cinquante-quatre années, suivant une courbe qui, comme l'écrit M. E.-F. Gautier, « est triomphalement ascendante ». Les grandes villes tiennent la tête du mouvement. Alger a 55.271 indigènes en 1926, au lieu de 47.086, en 1921 ; Oran, 24.615, au lieu de 20.059; Bône, 17.505, au lieu de 13.339.
 
Ces chiffres ont leur éloquence. Ils enregistrent la progression constante de la masse indigène, assurée désormais de se développer avec de précieuses garanties d'ordre public, de paix sociale, d'hygiène et d'assistance. Il est curieux de relire aujourd'hui, à la lumière de ces précisions, les prédictions fantaisistes de certains statisticiens qui, tirant de hâtives inductions du recensement de 1872, annoncèrent pour la fin du XIXème siècle la disparition des autochtones algériens.
 
Cet essor vital qui déborde toute prévision, cette croissance vigoureuse et drue qui a fait éclater çà et là l'appareil parfois étriqué de l'ancienne société musulmane, ne tiennent pas seulement à la santé et aux aptitudes prolifiques de la race arabo-berbère. Il faut aussi mettre en relief, parmi les facteurs de cette ascension, l'action de la paix française qui a définitivement clos les guerres fratricides de tribu à tribu. Les fastes du Moghreb jusqu'en 1830, la période romaine mise à part, ne sont qu'une longue suite de pillages collectifs et de combats, à tel point que la plupart des tribus étudiées par Ibn Khaldoun avaient disparu lors de l'arrivée des Français.
Il convient, en outre, de signaler nos oeuvres d'assistance et d'hygiène qui préviennent les épidémies ou en enrayent le développement. Vaccinations en masse, désinfections, soins gratuits aux indigents, dépistage immédiat de toute

(1) La prédominance ethnique appartient de beaucoup à l'élément berbère.

       maladie contagieuse, autant de causes qui contribuent puissamment à l'accroissement de la race.
 
Tirant ses preuves de l'histoire coloniale de l'Amérique et de l'Océanie, une école de sociologues a voulu montrer que lorsque deux groupes ethniques, fortement différenciés par le milieu originel, l'hérédité et le degré de civilisation, se trouvent en présence, l'un d'eux doit disparaître en vertu d'une loi fatale et inexorable, pour céder la place à la collectivité rivale. Ce sera l'honneur éternel de la France d'avoir, au contraire, assuré à l'Arabo-berbère, à côté de ses propres enfants, des puissances nouvelles de vitalité et de rayonnement.
 
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