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voire dangereuse, toute échappée sur l'avenir. Faut-il rechercher
l'origine de cette imprévoyance dans l'action déprimante du climat
qui, durant la saison chaude, dissout parfois les volontés et
amollit les esprits ? Quoi qu'il en soit, il est indéniable que
l'indigène était - et reste encore, bien qu'à un degré moindre -
insoucieux du lendemain. Il peut s'attacher à la contemplation du
passé, il n'envisage que rarement l'avenir; il est l'homme de la
minute présente. Il ne sent pas la nécessité de l'épargne.
Vienne une mauvaise récolte : c'est la misère.
Il a été créé, pour y remédier, deux organismes :
Pour les populations rurales : les sociétés de prévoyance.
Pour les populations citadines : les bureaux de bienfaisance
musulmans.
Les sociétés indigènes de prévoyance,
de secours et de prêts mutuels
C'est à tort que l'on attribue au Gouvernement impérial
l'initiative de cette institution. Dès les premières années de
l'occupation, en effet, l'Administration entreprit de lutter contre
la disette et l'usure, dans les régions définitivement pacifiées.
On utilisa à cette fin les silos existant dans les douars et qui
renfermaient, conformément aux usages musulmans, la part de grains
destinée aux malheureux. La gestion de ces organisations
rudimentaires fut confiée aux caïds, sous la surveillance des
officiers des Bureaux arabes. Mais le principe n'en était encore
que fragmentaire et local. On tenait à ménager les coutumes je nos
administrés musulmans et à ne pas leur imposer, dès le début, un
système de prévoyance collective qui eût manqué de souplesse et
risqué d'alarmer leurs susceptibilités. Ainsi que l'a dit
Montesquieu :
« C'est une maxime capitale, qu'il ne faut jamais changer les mœurs
et les manières dans un État Oriental; rien ne serait plus
promptement suivi d'une révolution; c'est que dans ces États, il
n'y a point de lois, pour ainsi dire, il n'y a que des mœurs et des
manières, et si vous renversez cela, vous renversez tout ».
Maxime prudente dont la France s'est toujours inspirée, non
seulement dans un but politique, mais encore et surtout pour
respecter les convictions et les usages de ses ressortissants.
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La famine qui sévit pendant les années 1867 et 1868 démontra que
l'humble silo de réserve ne répondait plus aux nécessités
économiques et le moment parut propice pour prendre des mesures
d'ensemble de nature à parer aux mauvaises récoltes. En attendant,
des silos furent creusés dans tous les cercles qui en étaient
encore dépourvus. Ils furent alimentés au moyen de donations
particulières et avec le produit des récoltes moissonnées sur les
terrains communaux.
Le Général Liebert, commandant la subdivision de Miliana, conçut
le projet de donner à la Mutualité et à l'Entr'aide musulmanes
une forme définitive. Il fut autorisé par le Maréchal de
Mac-Mahon à tenter cette expérience. Mais la guerre de 1870 en
interrompit les premiers essais.
Ce n'est qu'en 1884, que cette oeuvre a été généralisée par M.
Tirman, Gouverneur général, qui prescrivit, dans sa lettre du 29
mai 1884, la création dans toutes les communes mixtes d'une
Société de Prévoyance ayant pour but principal de prélever sur
le produit des récoltes des sociétaires une certaine quantité de
grains, à mettre en réserve pour les années déficitaires, avec
faculté de convertir une partie de ces cotisations en fonds
disponibles déposés dans des caisses spéciales.
Le succès de ces organismes a été définitivement consacré par
la loi du 14 avril 1893 : les règles générales relatives à leur
fonctionnement et à leur gestion sont contenues dans l'arrêté du
Gouverneur général du 7 décembre 1894, modifié par celui du 24
décembre 1914 et dans différentes circulaires.
Les principes qui ont inspiré la création des Sociétés de
Prévoyance sont les suivants :
1° Elles se constituent par la libre adhésion de chacun de leurs
membres et se recrutent exclusivement parmi les indigènes,
cultivateurs, khammès ou ouvriers agricoles, lesquels s'engagent à
verser une cotisation annuelle;
2° Cette cotisation est en nature ou en argent, au choix du
sociétaire; l'ensemble des cotisations forme le capital social;
3° Le caractère des Sociétés de Prévoyance est mixte. Ce sont
à la fois : des associations charitables ayant pour objet de venir
en aide, par des secours temporaires, aux ouvriers agricoles,
cultivateurs pauvres gravement atteints
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