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insuffisants : pas de géographie ni d'histoire, alors
que les enfants indigènes instruits dans les écoles d'Européens
manifestent un vif intérêt pour l'histoire de France et
s'enthousiasment pour la Révolution française ; un enseignement du
français sans base grammaticale ; pas de leçons de sciences à
proprement parler, etc. » C'est évidemment par l'éducation que nous
gagnerons peu à peu le coeur des populations musulmanes : déjà des
résultats ont été obtenus ; notre langue est partout comprise,
parlée partout, plus ou moins correctement, et les résultats obtenus
sont mesurés par un boursier qui, dans une famille kabyle de
Michelet, trouve un grand-père ignorant tout du français, un homme
mûr le comprenant mais le parlant à peine, et un jeune homme le
parlant et l'écrivant correctement. Aussi nous semble-t-il comme à
la majorité des auteurs des rapports, qu'il n'y a pas lieu de
désespérer et nous ne souscrivons pas au jugement pessimiste de Mlle
Desclaux, directrice de l'École normale de Saint-Brieuc, qui
constate « une imperméabilité (sic) trop certaine, du moins chez les
masses populaires », ni au regret de M. Ladoune, inspecteur primaire
à Montpellier : « les Arabes ne consentent jamais à se laisser
assimiler à la vie européenne ». « Vous jamais connaître les Arabes
», dit un guide indigène de Tlemcen à Mlle Savignat. Pas en quelques
jours évidemment, ni avec « l'esprit colon » trop souvent porté à
dénigrer l'employé qui ne donne pas toute satisfaction. Mais nous
croyons que les appréciations les plus sages sur ce grave sujet ont
été écrites par M. Gilles, instituteur au Cours complémentaire de
Langogne, bien préparé à comprendre la vie indigène par son service
militaire pendant la guerre dans des régiments de zouaves et de
tirailleurs. « Trop de différences, et trop profondes, nous
séparent, encore... Sans doute l'indigène hésite à entrer dans
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le courant
de la civilisation, mais nous n'en doutons pas, il y
sera bientôt tout-à-fait quand l'instruction répandue et
les oeuvres sociales créées à son profit auront donné
leurs fruits. La France peut être fière de son oeuvre. »
Les populations juives ont beaucoup intéressé certains
voyageurs qui connaissaient les critiques faites au
décret Crémieux. L'assimilation — au moins apparente — |
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des Israélites d'Algérie les
a beaucoup frappés. Les jeunes portent le
costume européen, participent à toutes les
manifestations de la vie coloniale
européenne, ont une activité en tous points
comparable à celle de colon. Et cette
évolution est assez récente, dans les villes
de l'intérieur, pour que Mlle Savignat ait
pu prendre à Tlemcen l'intéressante
photographie montrant un grand-père juif en
costume oriental menant par la main un
petit-fils vêtu à la dernière mode de Paris.
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Électeur,
travaillant dans la paix, enrichi par ses négoces, le
juif est un des plus sûrs bénéficiaires de la conquête.
Il est sans doute rallié à la France. Mais nos boursiers
l'ont constaté, il reste fidèle dans l'intimité à ses
moeurs d'autrefois. Cela n'a rien d'étonnant — la race
juive n'a-t- elle pas toujours été fortement attachée à
ses traditions : qu'en serait-il resté sans cela? — ni
d'inquiétant, et cette « vie double » nous apparaît
pittoresque, sans plus. |
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