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Louis-Philippe
Le gouvernement de Louis-Philippe a continué et achevé la
conquête de l'Algérie Il l'a achevée parce qu'elle était
commencée, et qu'il était pris dans l'engrenage ; parce qu'il n'a
pas pu trouver de demi-mesure satisfaisante ; parce que le roi
avait du sens politique; mais sans l'appui de l'opinion,
indifférente et même hostile. On a pu dire que nous sommes restés
en Algérie parce que nous n'avons pas pu en sortir. Ce fut une
conquête à contrecœur, par à-coups, sans plan préconçu, avec
des alternatives de découragement et de recul.
L'homme même à qui on finit par confier les effectifs et
l'autorité nécessaires pour la mener à bien, le maréchal
Bugeaud, avait commencé sa carrière en signant le traité de 'la
Tafna, qui était un demi-abandon.
Ce même Bugeaud pourtant avait pris pour devise un aphorisme latin
: Ense et aratro ; qu'on pourrait traduire à peu près : l'épée
n'a de sens que si elle cède la place à la charrue.
On entrevoit déjà l'avenir de l'Algérie qui était d'être une
colonie au sens étymologique du mot, une colonie de colons, une
colonie de peuplement.
La seconde République
La courte existence de la seconde République s'est écoulée dans
un tumulte d'émeutes françaises et européennes. Elle a pourtant
laissé sa trace en Algérie. Les déportations qui suivirent
l'insurrection de juin y ont déposé des germes, dont on ne songe
pas assez peut-être combien ils furent intéressants.
Une grande place en Algérie est occupée par les colons d'origine
italienne et surtout espagnole, dont l'éducation politique était
peu avancée, dans l'atavisme desquels le préjugé religieux
antimusulman était prépondérant. Les déportés, aux convictions
politiques ardentes, ont apporté l'esprit civique et laïc. Ils ont
été un ferment de grande importance.
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Le second Empire
La politique du second Empire fut en Algérie, encore que négativement,
extrêmement intéressante. A titre d'expérience avortée elle éclaire 'le
sens de l'évolution.
Le second Empire a suivi une politique exactement inverse de celle du
gouvernement précédent, et surtout du suivant. Il a vigoureusement remonté
le courant.
Ç'a été l'époque du u Royaume Arabe » : Napoléon III, empereur des
Français, était conçu comme sultan des musulmans algériens, à peu près
comme François-Joseph était empereur d'Autriche et roi de Hongrie. Il
mettait un simple lien personnel entre deux entités politiques aussi
indépendantes que possible.
Pratiquement, cela signifiait une barrière aux progrès de la charrue
européenne. Les colons étaient parqués dans des réserves autour de
quelques grandes villes. Tout le reste était le royaume arabe. Les
indigènes, gouvernés par les officiers des bureaux arabes, y étaient
efficacement séparés de la colonisation, tenus sous cloche, abandonnés à
leur propre puissance évolutive.
C'était une idée intéressante. Une certaine analogie est évidente avec ce
que nous appelons aujourd'hui le protectorat. .
Le second Empire, gouvernement autoritaire, a tenu solidement le gouvernail
algérien. Il fut même un temps où il a voulu le prendre directement en
main. Il créa à Paris un ministère de l'Algérie, qui fut confié au prince
Napoléon. La grande innovation était que l'Algérie dût être gouvernée à
distance, de Paris directement, par un ministre. C'est l'effort
d'administration directe le plis marqué qui ait été jamais fait par la
métropole. Qu'il ait été fait par l'Empire, rien de plus normal.
Cet effort échoua très vite. On dut reconnaître l'impossibilité de
gouverner d'aussi loin, hors de tout contact avec les réalités. L'esprit
faux que fut le prince Napoléon était tout désigné pour une entreprise
chimérique. Son cousin l'empereur, qui ne l'aimait pas, la lui a confiée
peut-être avec l'arrière-pensée qu'elle était condamnée à l'échec.
Mais après comme avant le prince Napoléon, l'Algérie fut aux mains d'un
gouverneur général tout puissant, qui fut invariablement un militaire, chef
naturel des bureaux arabes, tout dévoué à l'idée du royaume arabe.
Les colons, contenus et bridés, ont eu pour les bureaux arabes une haine
passionnée, injurieuse. Ils en ont dit
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