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CHAPITRE V
INDUSTRIES EUROPÉENNES
Mines
L'Algérie est un pays surtout agricole, assurément. Il ne faut
pas oublier cependant que c'est aussi un pays minier. Sur ce terrain
plus encore que sur aucun autre la conquête Française a amené une
transformation immense Avant notre arrivée les indigènes
connaissaient quelques gisements de plomb et d'antimoine, les plus
importants, ou les plus commodément situés pour eux. Avec la
galène ils fondaient peut-être des balles; mais surtout
l'antimoine écrasé leur donnait le koheul, la poudre noire avec
laquelle les femmes se fardent la figure. Au fur et à mesure du
besoin, n'importe qui allait à l'affleurement avec un petit
couffin.
Ils ne connaissent plus le minerai de cuivre, non plus que celui de
fer; çà ne les intéresse plus. I1 y a des siècles que l'Europe
leur fournit ces métaux-là, généralement ouvrés. Naturellement
ils ignorent davantage encore la blende ou la calamine qui est
pourtant un minerai courant dans l'Afrique du Nord. Ils n'ont pas la
moindre idée des phosphates, etc... La mine est une des
infériorités lés plus curieuses de l'Islam.
Tout ce qui a été fait en matière de mines l'a été depuis 1830
et c'est une création importante.
A diverses reprises, à propos de l'Algérie qui seule nous occupe
ici, on a été conduit à donner en passant quelques détails sur
la Tunisie et le Maroc. C'est qu'en effet, aux points de vue humain
et économique, les trois pays font bloc. Ils s'éclairent les uns
par les autres, il y a entre eux des répercussions intéressantes.
C'est sur le chapitre des mines en particulier qu'il est impossible,
si on veut être compris, de séparer l'Algérie de ses voisines. Il
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faut envisager l'ensemble du pays que les Arabes appellent le Maghreb, et que
nous appelons l'Afrique du Nord.
Le Maghreb a les gisements de phosphates les plus considérables de la
planète et les plus aisément exploitables. Surtout si l'on considère qu'ils
sont du bon côté du canal de Suez, au rebours des gisements analogues de
Haute Égypte, qui regardent la Mer Rouge et l'Océan Indien Le Maghreb est le
fournisseur indiqué de phosphates pour l'Europe. Il y a là une richesse
immense et pratiquement inépuisable.
Le fer se présente en gros amas. Beni-Saf entre Oran et la Moulouya, l'Ouenza
sur le côté algérien de la frontière tunisienne, etc...
Un appoint intéressant est fourni par les gisements de plomb et de zinc,
épars en très grand nombre sur tout le pays, plus particulièrement en
Tunisie, dans la province de Constantine, au Maroc Oriental.
Le Maghreb n'est pas outillé pour travailler ses minerais. Il les exporte en
totalité, à destination des grands centres métallurgiques Européens.
On a sous les yeux. matériellement, toute l'activité minière de
l'Algérie, rien qu'en se promenant dans les coins de port où s'embarquent
les minerais. Des tas assez discrets de petits sacs. Ils contiennent les
minerais de plomb et de zinc, calamine, blende : les minerais chers. Ce qui
tire l'œil surtout, ce sont les amas énormes, véritables petites collines,
de mine rais en vrac, minerais bon marché. Les collines rouges sont le
minerai de fer; les pâles sont le phosphate.
A côté des collines de minerais, rouges ou pâles, se dressent des grues
gigantesques, aux bennes suspendues. Les bennes déversent le minerai dans les
cales des vapeurs accostés à quai; pour être transporté aux usines
lointaines, en Angleterre, en Allemagne, en Belgique, en France. C'est du
minerai brut, tel que les mineurs l'ont extrait du sous-sol.
Et voici les quantités totales de minerai brut qui ont été exportés, benne
après benne, dans les différents ports de l'Afrique du Nord, et dans
l'année 1926. Un peu plus de 2 millions de tonnes de minerai de fer,
exactement 2.127.835 tonnes, dont l'Algérie à elle toute seule a fourni les
trois quarts.
C'est un tas impressionnant. Mais celui des phosphates
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