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sobre de réclamations et de repousser les pillards sans se laisser
arrêter par la ligne fictive de la frontière. Il renouvela ces
instructions comme Gouverneur général et n'hésita pas, en mai et
juin 1852, à faire châtier, par le général de Montauban, la
tribu marocaine des Beni Snassen, et à la forcer à accepter ses
conditions.
La Kabylie n'ayant jamais été soumise, Randon décida de réduire
les tribus successivement; à cet effet, il fit construire des
routes par les colonnes expéditionnaires, qui pouvaient ensuite
s'installer au cœur du pays en y étant bien ravitaillées. C'est
par ces moyens que les généraux Camou, de Mac-Mahon, d'Autemarre,
Bosquet obtinrent des succès. A l'Est comme à l'Ouest, les tribus
coupables furent poursuivies et châtiées au delà des frontières,
sans que le gouvernement de Tunis protestât davantage que celui du
Maroc, « preuve évidente, écrit Randon, que ces gouvernements
eux-mêmes reconnaissaient implicitement que les moyens employés
étaient les seuls efficaces.»
Le Sud algérien restait le refuge des dissidents. Un agitateur
ayant soulevé les tribus sahariennes, les généraux Pélissier et
Yusuf enlevèrent Laghouat d'assaut le 4 décembre 1852. Cet
événement amena Randon à organiser la pacification du Sahara.
Pour dominer le pays kabyle, il avait employé la route. Pour
dominer le Sud, il décida d'y établir une troupe mobile, capable
d'assurer la protection des tribus nomades grâce à un large
rayonnement; une garnison fut installée à Laghouat, sous le
commandement de l'énergique capitaine du Barail, et les Larbaa
furent chargés d"entretenir une smala de 500 méharis
harnachés, destinés à transporter soit des fantassins, soit des
vivres et des bagages. C'était la première ébauche des troupes
sahariennes.
La soumission de la Kabylie ayant été décidée pour 1853, ce fut
le ministre de la Guerre, le général de SaintArnaud, qui fut
chargé de diriger les opérations. Randon, ne pouvant souffrir une
atteinte si directe à ses prérogatives, envoya immédiatement sa
démission de gouverneur « Je n'ai pas à discuter les ordres de
l'Empereur, écrivitil, je n'ai qu'à m'y soumettre; mais, en
même temps, il importe que la dignité du commandement et la
considération militaire qui s'y rattachent soient sauvegardées. »
L'Empereur n'accepta pas sa démission; l'expédition fut ajournée
et remplacée par la soumission des Babor, par les divisions
Mac-Mahon et Bosquet, opérant sous les ordres de Randon. |
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Cette opération terminée, une expédition fut organisée dans le Sud contre
l'agitateur Mohammed ben Abdallah; l'âme en fut le chef religieux des Oulad
Sidi Cheikh, i Hamza. Tandis que, au début de novembre 1853, Si Hamza,
accompagné du commandant de Colomb, commandant supérieur de Géryville,
prenait la tête d'une colonne de goums chargés spécialement de poursuivre
l'agitateur, trois autres colonnes de goums, partant respectivement des
trois provinces, l'appuyaient en s'avançant vers le Sud, déployées ainsi
sur un immense front. Si Hamza entra à Metlili, puis à Ouargla, obtenant
plein succès. Ce spectacle d'un grand marabout qui combattait pour la France
un adversaire dressé contre elle au nom de la religion, et qui déclarait
n'avoir qu'un drapeau, le tricolore, impressionna fortement les Indigènes. Si
Hamza reçut, comme récompense, l'administration des territoires soumis. La
route desservit Laghouat l'année suivante.
Le souci de la pacification des régions insoumises n'empêchait pas Randon de
développer par tous, les moyens la colonisation. Les tentatives de créations
de villages et les ventes de terrains n'obtinrent pas de grands résultats,
parce que les colons ne venaient pas en assez grand nombre. Néanmoins, comme
le remarquait Randon, si les résultats acquis avaient été « de provenance
anglaise ou américaine, peut-être la critique eût-elle fait place à la
louange. » Il développa la culture du tabac et du coton; il organisa le
service des remontes et développa le goût de l'élevage des chevaux en
instituant des courses dans les trois provinces.
Il ne négligea d'ailleurs nullement les questions financières,
scientifiques, littéraires, artistiques, historiques et archéologiques, et
fut le fondateur de la Société historique algérienne, dont l'organe fut la
Revue Africaine, recueil précieux qui se continue toujours.
La guerre de Crimée fournit l'occasion de tenter une épreuve décisive.
Tandis que la France se trouvait aux prises avec une puissance musulmane, ses
sujets algériens allaient-ils lui rester fidèles?, Un mouvement en Kabylie
fut rapidement maîtrisé par l'expédition du Sébaou, qui valut à Randon la
croix de grand officier de la légion d'honneur. Une tentative d'agitation de
Mohammed ben Abdallah dans le Sud amena la prise de Touggourt et la
soumission de l'oued Rhir. Pendant ce temps, les tirailleurs et les zouaves se
battaient pour la France en Crimée, y couvrant de gloire les drapeaux de
leurs régiments.
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