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d'Abd el Kader, et proposa d'établir une division à Mascara et de
rayonner de là, au lieu de rester à la côte. Il fut fait
maréchal-de-camp, à 34 ans, et nommé au commandement de la
province d'Oran.
Le premier soin de La Moricière dans ses nouvelles fonctions fut de
s'occuper de la santé de ses hommes; il étendit et améliora leurs
casernements, il les dota d'une ceinture de flanelle, d'un petit
bidon ou d'une peau de bouc pour transporter de l'eau; il
remplaça le col d ordonnance par une cravate ; il fit découdre les
sacs de campement pour permettre, en les réunissant, de dresser des
tentes au bivouac. Il organisa, sous les ordres du capitaine Daumas,
un service de renseignements en relations constantes avec les
Indigènes.
Il entraîna et aguerrit pendant quelques mois ses troupes dans de
petites expéditions aux environs d'Oran ; puis il pensa à
réaliser son projet d'occupation de Mascara. Lorsqu'il eut
préparé l'expédition avec le plus grand soin, en prenant
Mostaganem comme base, Bugeaud vint, en mai 1841, en prendre le
commandement, et, après avoir détruit Tagdempt, occupa Mascara,
où il laissa une garnison. La Moricière s'occupa activement de
l'aménagement de Mascara; il en fit non seulement une garnison
saine, mais le centre d'où partaient des colonnes destinées à
soumettre les tribus ralliées à Abd el Kader.
Afin de pouvoir rayonner au loin sans avoir à se ravitailler, La Moricière
pourvut ses soldats de petits moulins à bras leur permettant de
moudre eux-mêmes leur blé, qu'ils cuisaient ensuite en galettes à
la mode arabe; ce blé, ils le trouvaient dans les « silos »,
sortes de cavernes souterraines dans lesquelles il était enfoui, et
dont les indicateurs indigènes faisaient connaître les
emplacements ; la viande était fournie par les bœufs et les
moutons provenant des razzia. Les chaussures étaient
remplacées, quand elles étaient usées, par les peaux des bœufs
de razzia. Disposant de peu de cavaliers, La Moricière les
remplaçait par des bataillons d'élite dont les sacs étaient
portés sur des mulets. Ses troupes, toujours en route, étaient
mieux portantes que si elles avaient végété dans l'oisiveté des
camps.
Dans une campagne d'hiver en 1841, il soumit les tribus des environs
immédiats de Mascara, puis, dans une campagne de printemps 1842, il
rayonna largement, maintenant dans une alerte perpétuelle les
tribus d'Abd el Kader, obtenant |
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la soumission de nombre d'entre elles et les dotant aussitôt
d'une organisation administrative. En septembre, il poussa dans le
Sahara, jusqu'à Taguin; puis, revenant vers le Nord, il faillit à
deux reprises successives s'emparer d'Abd el Kader.
Dés qu'il avait pacifié, La Moricière cherchait à organiser. Il
s'occupa beaucoup des terres domaniales, de la zone civile qu'il
entendait développer autour d'Oran, des commissions militaires
destinées à administrer les centres de colonisation. Pour tenir le
pays, il fonda Tiaret en avril 1843, comblant le vide qui séparait
les provinces d'Alger et Oran ; puis, pendant l'été, il fonda Sidi
bel Abbés et releva Saïda, postes destinés à servir de points
d'appui et de ravitaillement aux colonnes opérant contre Abd el Kader.
Nommé général de division et revenu à Oran, La Moricière
s'appliqua aux questions de défrichement, de conduite et de
distribution des eaux, de routes; il sut associer, pour tous les
grands travaux tels que les barrages, la main-d'œuvre des tribus à
celle de l'armée.
Inquiété par les incursions que les partisans de l'Émir,
réfugié aux confins du Maroc, faisaient sur le territoire
algérien, il fut obligé de fonder deux postes à l'ouest et au sud
de Tlemcen : Lalla-Maghrnia et Sebdou. Les hostilités avec le
Maroc s'étant ouvertes, la bataille de l'Isly lui valut de nouveaux
lauriers. Il eut ensuite à deux reprises l'intérim du gouvernement
de l'Algérie, en 1844 et en 1845, pendant les séjours de Bugeaud
en France.
Lorsqu'en l'absence du Maréchal éclata l'insurrection de septembre
1845, marquée à son début par la catastrophe de Sidi-Brahim, La Moricière
se trouva en face d'une situation grave, à laquelle il sut parer
par des mesures immédiates. Il partit d'Alger avec des renforts
pour l'ouest, rejoignit Cavaignac, accula une partie des populations
révoltées à la mer, et se montra généreux en leur accordant
l'aman.
Amèrement critiqué par Bugeaud, qui lui reprochait d'avoir fondé
trop de postes, il continua néanmoins à faire de son mieux pour
coopérer, avec son chef, aux opérations de poursuite menées
contre Abd el Kader ; il eut toutefois des discussions fréquentes
avec lui, aussi bien pour ne pas évacuer des postes qui lui
paraissaient indispensables, comme Sidi bel Abbés et Aïn
Temouchent, que pour ne pas imposer aux troupes des efforts
disproportionnés aux résultats possibles.
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