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d'un budget spécial. Enfin, la loi du 24 décembre 1902 a aménagé
une circonscription administrative distincte de l'Algérie : les
Territoires du Sud.
Le nouveau régime s'inspire de l'idée que l'Algérie n'est pas un
simple prolongement de la France continentale; qu'au contraire sa
situation géographique, sa formation ethnique et son développement
économique lui donnent une physionomie propre; qu'il faut, d'autre
part, distinguer dé l'Algérie proprement dite, formée du Tell et
des Hauts Plateaux, le Sahara algérien, territoire immense,
désertique et impropre au développement d'un peuplement européen.
On fera, en conséquence, application à l'Algérie de la mesure
prise pour les autres possessions extérieures de la France par la
loi du 13 avril 1900, qui institue des budgets coloniaux distincts
de celui de l'État et fonctionnant avec des ressources propres:
Mais sa situation particulière, son importance exceptionnelle, le
caractère de ses institutions, bien différentes de celles des
colonies, comportent la nécessité d'une législation budgétaire
spéciale. On la distinguera, en outre, des Territoires du Sud, qui
forment une unité administrative séparée ayant, elle aussi, la
personnalité civile. Enfin, les libertés octroyées seront
soigneusement limitées. Il ne s'agit d'accorder à l'Algérie, ni
une autonomie, ni même une autonomie financière. La gestion des
intérêts, si elle est décentralisée, demeure subordonnée aux
pouvoirs publics français, dont rien n'affaiblit l'initiative et le
contrôle; l'unité politique subsiste, la souveraineté française
est intacte.
Les mesures prises dans cette perspective se ramènent à une
augmentation des pouvoirs du Gouverneur général; à l'institution
d'une assemblée élective : les Délégations Financières; à
l'élargissement du Conseil supérieur du gouvernement et à
l'organisation des Territoires du Sud. Elles sont, pour la plupart, l'œuvre
de Laferrière, vice-président du Conseil d'État, gouverneur
général d'août 1898 à octobre 1900, qui, avec une véritable
maîtrise juridique et une expérience administrative consommée,
sut agencer le mécanisme compliqué, nécessaire à leur
application. Elles allaient fournir à l'Algérie un aliment
d'activité suffisant pour la détourner des agitations
consécutives aux troubles antisémites.
Le Gouvernement général de l'Algérie devient une très importante
institution.
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Nommé par décret rendu en Conseil des Ministres, sur là proposition du
Ministre de l'Intérieur, c'est-à-dire, suivant une procédure solennelle qui
met en jeu la responsabilité du cabinet tout entier, le Gouverneur général
est un des plus hauts fonctionnaires de la République. Sa fonction est
entourée d'un grand prestige; représentant du gouvernement français, il a
la préséance sur tous autres en Algérie. Des honneurs y sont attachés;
ceux auxquels a droit un général commandant une ou plusieurs armées. Elle
comporte encore l'avantage d'un traitement élevé, la libre disposition du
crédit des fonds secrets, et la jouissance de deux palais. Aussi sera-t-elle
briguée par les plus hautes personnalités de la politique et de
l'administration. Pour en charger des parlementaires, on tournera, jusqu'à
ces derniers temps, la règle constitutionnelle qui prohibe le cumul du mandat
avec une fonction rétribuée, - en leur confiant des missions renouvelables
de semestre en semestre.
Les attributions du Gouverneur général sont multiples. Elles débordent
largement les dispositions des décrets de 1898 et des lois de 1900 et 1902.
Il faut aller les chercher jusque dans les décrets du 31 décembre 1896 et du
10 décembre 1860. On les trouve encore, dispersées, dans quantité de textes
de lois et de décrets spéciaux. Dans l'ensemble, elles résultent d'une
double mission de représenter le gouvernement de la République française et
l'Algérie, personne civile. Agent régional du gouvernement, le Gouverneur
général veille au maintien de l'unité politique française et aux grands
intérêts nationaux; il prend, à ce titre, toutes les mesures
exceptionnelles et urgentes que comporte l'exercice du droit de souveraineté.
Agent d'une administration locale décentralisée, il est chargé de la
gestion des intérêts généraux de l'Algérie, fait les affaires courantes
du public algérien, exerce la tutelle administrative des départements et des
communes. Comme tous les représentants du pouvoir exécutif, il amalgame,
d'ailleurs, en un mélange intime, la fonction de gouvernement et la fonction
d'administration. Ses arrêtés réglementent des matières qui, en France,
feraient l'objet de décrets ou d'arrêtés ministériels. Certaines de ses
décisions supposent des pouvoirs présidentiels; d'autres, en plus grand
nombre, ceux d'un ministre. Par exemple : il nomme les officiers
ministériels, crée les communes mixtes; il peut dissoudre l'assemblée des
Délégations Financières, déclarer l'état de siège en cas d'interruption
des communications entre l'Algérie et la Métropole, disposer, en temps de
paix comme en temps de guerre, pour la sûreté et la défense du territoire,
de l'armée
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