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CHAPITRE II

Audax lapheti genus ! Tous ceux qui abordèrent, le sabre en main, poussés par le vent qui porte les conquêtes et renverse les dominations, surent, désormais, à quelle oeuvre grandiose on les conviait : reprendre la tradition romaine, perdue depuis un millénaire et ramener l'Afrique barbare à la civilisation 'axiale supérieure de l'Europe méditer­ranéenne.
Comme ils l'aimèrent, alors, cette terre sauvage, farouche avec ses plaines désertes, ses horizons de montagnes bleues et ses guerriers de blanc vêtus, religieux comme des moines, braves comme des lions!
Qu'ils l'aient aimée peut seul expliquer le dénouement de ce drame violent de la conquête, dont vainqueurs et vaincus sortirent réconciliés, unis sous les drapeaux de nos belles divisions d'Afrique, et l'inattendu de cet autre spectacle : des soldats administrant le pays avec une telle maîtrise, suivant une méthode si intelligemment conçue et si bien adaptée que leur oeuvre, bientôt séculaire, demeure encore l'assise profonde de notre organisation nord­africaine.
Les fastes de notre armée d'Afrique relèvent de l'histoire. Le régime d'administration militaire demande seul à être ici précisé.


Implicitement annexée à la France, l'Algérie entre dans le groupe des établissements français d'Afrique que la loi du 24 avril 1833 déclare régis par les ordonnances royales.
C'est une colonie militaire dont l'ordonnance du 22 juillet 1834 définit brièvement le régime. Elle est rattachée au Ministère de la Guerre et dirigée par un chef auquel le Roi a délégué d'importantes attributions de gouvernement et d'administration.
Le Gouverneur Général dispose de la force armée, conduit lui-même les opérations dé guerre, négocie et conclut la paix avec les indigènes. Son activité dans ce domaine n'a d'autres

      

limites que celles imposées par la politique intérieure et extérieure et le risque d'être désavoué par le Gouvernement, en cas d'entreprise inopportune: Il prépare les projets d'ordonnances nécessaires à l'organisation du pays conquis et les transmet au Ministre. Au besoin, en cas d'urgence, il édicte, sans attendre que ces projets aient été ratifiés, des arrêtés qui, en rendent provisoirement exécutoires les dispositions. Directement ou indirectement, il a donc tous pouvoirs pour transporter, telles quelles, en Algérie, les institutions métropolitaines, en principe applicables au pays du fait de son annexion; ou leur faire subir une adaptation préalable aux circonstances locales; ou, au contraire, retarder leur application; ou, enfin, leur substituer des organismes nouveaux.
C'est Bugeaud, rude tâcheron du labeur de conquête, qui va forger la pièce essentielle de cette armature militaire. L'Arrêté ministériel du 1er février 1844, qui organise le service des Bureaux Arabes, mise au point d'une série d'expériences tentées depuis la prise d'Alger, porte l'empreinte de son génie créateur. On perfectionnera la construction. Mac Mahon lui donnera sa réglementation définitive dans la minutieuse circulaire du 21 mars 1867, mais n'y ajoutera rien de vraiment nouveau.

Les Bureaux des Affaires Arabes sont composés d'officiers de toutes armes, spécialisés dans la connaissance de la langue, des mœurs et des habitudes des indigènes; placés dans la position, dite « hors cadres », ou détachés des corps de troupe et mis à la disposition du Service.
Celui-ci comprend : un bureau central appelé « Bureau Politique », à Alger; trois directions provinciales prés les généraux commandant les divisions d'occupation ; des bureaux de première et deuxième classe près les généraux commandant les subdivisions et les officiers supérieurs, chefs des circonscriptions dénommées cercles; des bureaux d'annexes dans les cercles trop étendus; enfin, des postes dont les chefs sont chargés de missions spéciales ou temporaires.
Un Bureau Arabe réunit : un officier, chef de bureau; un ou plusieurs officiers-adjoints ; un interprète ; un ou plusieurs secrétaires qui sont des sous-officiers ou soldats français; un secrétaire arabe ou khodia ; un chaouch, sorte de garçon de bureau ; une force armée composée d'un détachement de spahis réguliers; des auxiliaires indigènes, fantassins et cavaliers. Un médecin est attaché au bureau.

 
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