Pages précédentes CAHIERS DU CENTENAIRE DE L'ALGÉRIE LIVRET 6 Art Antique et Art Musulman en Algérie Pages suivantes
- 108 - Table des matières - 109 -
   
   Il vous convie à une joie enivrée de lumière. Les matins d'El-Biar et d'Alger sont divins. Il est des aurores où le soleil allonge ses rayons; la mer a le regard bleu des Méditerranéennes, sous leurs cils palpitants et dorés...
Mais ce sont surtout les arts mineurs qui regorgent de sève. - Qu'étaient-ils en 1830?

Les arts mineurs avant 1830(1)

C'est bien à tort que l'on a situé au début du XIXème siècle le sommet de l'art mineur arabo-berbère. Comme nous le verrons, dès 1750, peut-être avant, les industries locales étaient agonisantes. Le XVIIème siècle est l'heure de leur plein épanouissement.

LES TAPIS

Ils se confondent avec la vie pastorale et leurs couleurs enluminent le passé fabuleux. L'art du tissage revient fréquemment dans Homère (Iliade, chant VIII, V, 288; XIV, V, 178, XXII, V, 440. - Odyssée, chants XIV et XVIII). L'Agamemnon d'Eschyle a scrupule de fouler le tapis que Clytemnestre fait étendre : " C'est aux Dieux, s'écria-t-il, qu'un tel hommage est réservé, un mortel ne doit pas marcher sur la pourpre richement brodée ". Et le livre VI des Métamorphoses décrit, avec une laborieuse exactitude, le labeur d'Arachné : ainsi la cadence d'Ovide rythme la genèse du tissage.

(1) Eudel: Orfèvrerie algérienne et tunisienne- - Vachon: Les industries d'art indigène en Algérie. - Violard: Les industries d'art indigène. - G. Marçais : L'Exposition d'art musulman. - Van Gennep : Études d'ethnographie algérienne. - Cox: Rapport sur l'industrie des tapis en Algérie. - Ricard: Arts marocains, Broderies, Corpus des tapis marocains- - Bel et Ricard : Le travail de la laine à Tlemcen. - Berque : Les Arts indigènes algériens en 1924. - Delaye: Notions pratiques de tissage. - Mlle Bonnet: L'Industrie du tapis à la Kalaâ des Beni Rached. A citer également un lumineux et très suggestif rapport de M. Jules Rouanet relatif à la mission qu'il accomplit en 1910 â l'exposition de Munich. Ce document est malheureusement demeuré inédit..

      
La méthode et l'outil conservent, d'ailleurs, un type invariable depuis la plus haute antiquité. Déjà, 3.000 ans avant J.-C., l'hypogée des Beni-Hassan représente un métier de tissage.
C'est, à peu de choses près, celui des Africains. Un vase antique, exécuté environ 400 ans avant J.-C. et exhumé à Chinsi, reproduit ce modèle. La cadence du métier scande les premiers efforts de l'humanité; il se maintient à travers les siècles.
Cet art délicat, si intimement mêlé à la vie de la tente, trouva de nombreux amateurs parmi les populations du Maghreb. Fakehy s'extasie sur un luxueux tapis nord-africain, présent d'Haroun Er Rachid. Plus tard, une fête au Méchouar tlemcénien étala sous Abou-Hamou " une profusion de coussins alignés, de tapis étendus ". M. Fagnan, traduisant une chronique de la dynastie saâdienne, conte l'aventure d'une intendante des Mérinides malencontreusement tombée entre les mains des Chérifs. Ces bons princes la chargèrent d'enseigner à leur peuple
" comment faire des
" tapis de soie ". Haêdo relève consciencieusement des importations de cochenille d'Espagne c'est, sans aucun doute, pour la teinture. Marmol, toujours bien renseigné. n'ignore pas les tapis de Tlemcen et de Mila. Léon l'Africain, scrupuleux Christophe Colomb qui découvre l'Afrique, apprécie les tisseurs de Nédroma,
Fig. 65.- Préfecture d'Alger (collect. A- F.)
de Tlemcen, d'Oran, de Cherchell, de Miliana, de Constantine et de Mila. Le Docteur Shaw qui habita 12 ans Alger, dans la première moitié du XVIIIème siècle, comme " chapelain de la factorerie anglaise ", découvre dans des intérieurs citadins quelques tapis " d'une grande magnificence, soit pour la " matière, soit pour le travail ". Il goûta ceux de Kalâa ; dans la région de Mila, dit-il, on cultive la garance, destinée probablement à la teinture des tissages. En 1789 encore, Venture de Paradis enregistre des importations de cochenille de Marseille et, parmi les exportations, " 3 ou 400 quintaux de vermillon cueilli à Mascara et à Titteri ". Vers 1814 même, en dépit de sa décadence, la facture algérienne conservera une petite clientèle d'Europe: Pananti est l'ami d'un négociant marseillais qui vient " à Alger pour se
 
Pages précédentes   Table des matières   Pages suivantes