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" Même si elles sont bien reposées, elles n'abattent pas beaucoup de "besogne, non seulement parce que leur travail est lent et délicat, mais surtout parce que la plus grande activité de la femme mauresque est toujours un peu nonchalante. En vain leur surveillante, la bonne Mme Midy, s'époumone à crier: " Fissa ! " (vite). L'excitation ne dure pas. J'en ai entendu qui disaient à leur voisine : - Bats-moi pour que je travaille. Mais vient le moment de la récréation après celui du déjeuner, le jeu ne chôme pas. Les osselets sont un de leurs plaisirs favoris et quelques-unes y sont d'une très grande adresse. Tout à coup, dans la matinée, un grand remue-ménage se produit. Toutes, rapides et rivales, quittent leur métier et grimpent l'escalier en criant joyeusement: Lella Ben Aben. "

      

A Kalaâ, Mme Missié s'efforçait de restaurer l'industrie locale après une étude attentive des plantes tinctorales du bled.
Mlle Quetteville, à Oran ; Mme Delfau, à Alger; Mme Saucerotte, à Constantine; Mlles Saëtton, à Tlemcen, essayèrent à leur tour d'infuser une vie nouvelle aux modèles tombés en décadence. Mais ces initiatives privées, où se sont déployés des dévouements et une compétence hors de pair, demeurèrent isolées.
C'est pour une grande part à l'Administration académique et, plus tard, à la Direction des Affaires Indigènes au Gouvernement Général, que l'Algérie doit la résurrection de ses arts mineurs. Création d'écoles d'apprentissage, restauration de la palette et du décor, rénovation des techniques, tel est le bilan de l'œuvre.

A. - L'école Professionnelle, - L'Artisanat

L' " école-ouvroir indigène " est un conservatoire des arts mineurs algériens.
Des cours d'apprentissage ont été annexés aux Écoles de garçons. Ils fonctionnent sous la direction d'un instituteur aidé de maîtres-ouvriers spécialisés. On y apprend l'ébénisterie, le tournage et la sculpture, la dinanderie, l'ajustage et la ferronnerie, la broderie, le repoussage, la cordonnerie, le tissage de la laine, de la soie et la teinturerie.
Dans les écoles de filles, la formation professionnelle va aussi de pair avec l'enseignement proprement dit. Les élèves qui le désirent, et elles deviennent de jour en jour plus nombreuses, apprennent le tissage, la broderie et la dentelle. Chaque école a reçu sa mission de résurrection artistique, appropriée aux traditions locales: Constantine. Sétif, Bougie rénovent le tapis du Guergour ; celui du Djebel Amour revit à Reibell, à Djelfa, à Aïn-Madhi; celui de Kalaâ, à Mostaganem et à Orléansville. Des ouvroirs de Kabylie se spécialisent dans le tissage berbère. On essaye, en même temps, d'acclimater, en Algérie, des types étrangers: tapis du Maroc dans les écoles de l'Oranie, tapis de Kairouan et d'Asie Mineure à Alger.
" Les Ecoles-ouvroirs ne visent pas, il est utile de le préciser, à la production industrielle, mais à l'apprentissage. Leur formation terminée, les jeunes filles indigènes quittent l'école; mais elles peuvent, elles doivent continuer à travailler chez elles. L'école les y aide, en leur transmettant des commandes, en leur fournissant même les matières premières nécessaires, en surveillant aussi leur travail et en leur assurant ensuite des prix rémunérateurs. " Pour accentuer encore cette formation, pour imprimer à,

 
Fig. 68 ter- - Brodeuses au travail.

" C'est qu'au premier étage elles viennent d'apercevoir penché sur la balustrade, le visage de la directrice... et les voilà toutes autour d'elle comme une grappe, les unes lui baisant les mains, les autres jetant à son cou de fraîches, petites et odorantes guirlandes de jasmin ou de fleurs d'oranger.
Mais désormais, le travail est sérieux. La directrice distribue les tâches, donne un conseil, corrige les fautes; elle-même trace les dessins, choisit les couleurs et doit marquer, par un petit point de soie, la teinte de chaque partie de l'ornementation. Sur le tissu ainsi préparé, les jolies têtes brunes se pencheront de longs jours, les doigts effilés courront avec autant de patience que de prestesse, avant qu'apparaisse dans tout son éclat le moindre petit carré de broderie. " 

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