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L'ALGÉRIE KHAREDJITE, CHIITE ET SANHADJIENNE


Les conditions historiques et sociales

647. - L'avant-garde mahométane apparaît en Tunisie (Ifrigiya). Mais il s'agit là d'une simple reconnaissance. C'est seulement en 670 qu'avec Okba - Sidi Okba - la conquête commence. Il fonde Kairouan, première en date dés « villes d'art musulman » de l'Afrique Mineure. Vers la fin du VIIème siècle, la résistance acharnée des Berbères était momentanément brisée. Leurs bandes suivirent en Espagne les nouveaux maîtres. Mais l'islamisation était encore superficielle et ce n'est que peu à peu qu'elle gagna les couches profondes. On dit qu'en soixante-dix ans, l'autochtone apostasia douze fois.

Une double loi domine l'évolution religieuse du peuple berbère: d'abord, sa forte ambiance dissout rapidement tous les cultes d'apport étranger; il va berbériser l'Islam, comme il a berbérisé le paganisme. Ensuite, son individualisme anarchique le jette à tous les schismes, à toutes les dissidences: il a été donatiste et circoncellion contre l'Église; il sera Kharedjite et Chiite contre l'Islam officiel. Le Kharedjisme, c'est l'Islam intransigeant, égalitaire. farouchement puritain. La doctrine s'étend rapidement sur le Maghreb. En 761, un gouverneur persan chassé de Kairouan, Ibn Rostem, gagné lui-même à l'hérésie, fonde Tahert (à 10 kilomètres à l'ouest de notre Tiaret), capitale d'un nouveau royaume et d'une dynastie autonome, les Rostémides. Tabert sera, de 761 à 909, l'organe propulseur du Kharedjisme berbère, le centre d'une civilisation de forme très curieuse, où l'âpreté de la controverse théologique, l'affectation de simplicité des imams, le goût des manuscrits d'Orient, iront de pair avec la passion du négoce, le trafic des moutons et des terres.

      

Civilisation originale où le chemin du ciel côtoie les riches marchés d'affaires.

Après le Kharedjisme, le chiisme. Les chiites rejettent la Sounna, (recueil des traditions du Prophète). Ils vénèrent le gendre de Mahomet Ali et attribuent la souveraineté à sa descendance seule (à l'époque, les Fatimides). Tout autre Khalife n'est qu'un usurpateur; mais l'imam véritable, le chef futur, vit toujours; il est caché; le devoir du fidèle est de le découvrir, de le remettre sur le trône. C'est en somme, le Mahdisme, la croyance à un « maître de l'heure » qui surgira brusquement en ce monde. Doctrine bien faite pour séduire l'esprit berbère toujours épris de merveilleux! Les Kotama, tribu du nord constantinois, entre Constantine et Djidjelli, puis plus tard, les Sanhadjas, qui tenaient le pays de Blida à Sétif, embrassèrent la nouvelle hérésie. En 909, ils prirent Kairouan et détruisirent Tahert. Quelques Kharedjites, échappés au sac de Tahert, allèrent s'établir à Sédrata, près d'Ouargla. Nous retrouverons tout à l'heure les débris de leur art.

Voilà donc, au début du Xème siècle, les Fatimides installés au khalifat de Kairouan. Leurs clients, les Sanhadjas, sont des sédentaires, des cultivateurs. Une autre tribu, les Zenatas, nomades et pasteurs, séparés des Sanhadjas par une haine atavique et des rivalités économiques, va, à son tour, entrer dans l'histoire algérienne. Les Zenatas occupent alors l'aire située entre le Tell occidental et le Hodna. La lutte des Sanhadjas, partisans des Khalifes Fatimides, et des Zenatas, inféodés aux Khalifes de Cordoue, remplit le Xème siècle.

Les Sanhadjas Beni Ziri fondent Achir, dans les monts du Titteri (département d'Alger), avant-poste pour contenir les Zenatas. En 973, le Khalife fatimide quitte la Tunisie pour l'Égypte. Il abandonne le Maghreb aux Beni-Ziri, dont l'un, Hammad, bâtit une citadelle, la Qala des Beni-Hammad, sur les hauteurs voisines du Hodna, au sud-ouest de Sétif. En 1.017, les Beni-Hammad deviennent autonomes. La Qala prend d'ès lors figure de Métropole berbère. Mais en 1.090 l'invasion hilalienne force les Hammadites à se réfugier à Bougie, où ils tentent de reconstituer les monuments de Qala.

Ainsi se ferme, au seuil du XIIème siècle, la première période de l'Algérie Musulmane. Retenons qu'elle a fondé ou embelli Tahert (Tiaret), Sédrata, Achir, la Qala et Bougie.

 
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