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« accroître l'élévation de celui qui m'a achevé comme ce
dernier l'a fait à mon égard et comme il a exhaussé mes parois.
Que l'assistance de Dieu ne cesse d'être autour de son étendard,
le suivant comme un compagnon et lui servant de seconde armée »
(version Devoulx).
Une tradition reporte à Ion Tachfin (1061-1106) la foi. dation de
cet établissement. Rien ne permet, en l'absence de texte, de se
prononcer définitivement. Mais il est vraisemblable qu'Ibn Tachfin,
almoravide dévot, à, la fois mystique et guerrier, ambitieux
d'ouvrir dans chaque rue un oratoire, ait voulu doter la ville d'une
Mosquée.
Nous ne pouvons guère aujourd'hui en reconstituer l'économie
primitive. De nombreuses modifications y ont été successivement
apportées, ne serait-ce que, sans remonter très loin, la galerie
d'arcades, soutenue par des piliers de l'ancienne mosquée El-Sida,
et qui a été construite par l'administration française en 1837
(fig. 37).
L'édifice suit dans son axe l'orientation Nord-Ouest Sud-Est. Il
emplit un quadrilatère d'environ 2,000 m2, 48 mètres environ à la
façade Nord-Ouest, 40 au Nord-Est et au SudOuest. En 1866, avant
les transformations, de voirie du quartier, Devoulx signalait
contre le mur sud-ouest une annexe, El Djenina, et du côté
nord-est, le Msolla, oratoire des dernières prières
prononcées aux enterrements. Il mentionnait, en outre, 5 portes au
nord-ouest, 2 au nord-est et au sud-ouest. A la porte des Bocaux, le
passant altéré pouvait se rafraîchir, avec l'eau contenue dans de
grandes jarres et renouvelée chaque jour.
L'intérieur comporte 72 piliers en maçonnerie, rectangulaires ou
cruciformes, distants de 3m.40 et formant onze nefs parallèles
orientées du nord-ouest au sud-est. La nef médiane a une largeur
de 5 mètres. Elle aboutit, au milieu du mur oriental, au mihrab,
niche à fond plat à pans coupés,
Des analogies saisissantes rapprochent la grande Mosquée d'Alger de
la grande Mosquée de Tlemcen . l'allure des nefs allant de la cour
au mur oriental centré du mihrab ; le nombre impair de ces nefs
dont la médiane est, dans les deux mosquées, plus large que les
autres; --- la forme des arcs, tantôt en fer à cheval déformé,
tantôt bordés de lobes incurvés; --- la forme rectangulaire ou
cruciforme des piliers, etc...
Le minbar (chaire à prêcher) de la grande Mosquée d'Alger a une
haute valeur documentaire. Il va nous permettre de surprendre les
premières influences andalouses. |
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Il a fait dans Hespéris (1921, 4e trimestre) l'objet d'une monographie
très fouillée et très suggestive de M. Marçais (Fig. 36 et 37).
D'abord, en avant des 8 marches, le grand arc, en fer à cheval brisé. Or,
cette forme n'est pas spécifiquement orientale; elle est devenue comme la
signature de l'architecture maghrébine et andalouse. - L'inscription
ensuite.
La décoration musulmane a admirablement utilisé l'écriture, sous deux
formes, le koufique et le cursif, dont il faut ici dire un mot.
Le koufique, épigraphie géométrique, d'abord anguleux, rigide, isolé du
reste du décor, s'est peu à peu dégagé de sa gangue primitive assez
fruste. Il a évolué de
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manière à s'arrondir, à s'assouplir, à se lier aux buissons
voisins de l'arabesque. Le cursif, généralement privé d'angles,
arrondi, délié, d'un mouvement rapide et échevelé, est allé en
s'enroulant en de gracieux écheveaux, en s'affinant, en jetant de
longues tiges flexibles et flottantes. - Or, l'inscription du minbar
n'a pas le type fleuri du Koufique oriental du XIème siècle. Elle
évoque le genre qui sera usité à la grande mosquée de Tlemcen. -
L'ornementation des 48 panneaux de bois, enfin, est significative :
la décoration végétale, tant par les jeux divers de la tige que
par les combinaisons de la flore, acanthe ou feuille de vigne,
rappelle certains motifs de l'Aljaferia de Saragosse. Elle inclut le
minbar de la grande Mosquée d'Alger dans l'art musulman de
l'Occident: « Le meuble de 1097 montre le rattachement d'Alger, la
ville çanhadjienne, à l'influence civilisatrice de l'Andalousie et
du Maghreb » (Marçais).
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