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La Qoubba de Sidi Boumédine et la Mosquée d'El-Eubbad

Petit village arabe à environ 2 kilomètres au Sud-Est de Tlemcen, « El-Eubbad » est le pluriel de « Abed », pieux. Les Européens appellent l'agglomération: Sidi­Boumédine. « El-Eubbad » est plus doux. Le mot sur les lèvres a une saveur de miel. Et voyez! la colline vibre du zig-zag doré des abeilles...

Sidi-Boumédine, l'une des figures les plus saillantes de l'hagiographie maghrébine, naquit à Séville, vers 1126. Il fit ses études à Fez, puis à la Mecque. Il embrassa le soufisme: manière de quiétisme ascétique, à fond de panthéisme inavoué, où se mêlent des réminiscences alexandrines et hindoues. Les miracles de Sidi-Boumédine sont célèbres: d'un regard il domptait les lions; sa pensée arrêtait un bateau chargé d'esclaves qu'il voulait délivrer; il rendait ses disciples invulnérables au feu. Sa renommée s'étendit dans l'Islam tout entier. Quittant Bougie où il avait enseigné, il allait à Merrakech, quand arrivé à quelque distance de Tlemcen, il s'écria, désignant la colline d'El-Eubbad : « Quel lieu admirable pour dormir le dernier sommeil ! » Il mourut le jour même et fut enseveli à El-Eubbad (1197), sous la qoubba ou il repose encore. Son tombeau, devenu lieu de pèlerinage, a été magnifié par les poètes arabes. « Si nos corps sont loin de l'endroit où tu reposes; nos cœurs ne soupirent pas moins après le moment où il nous sera permis de te revoir. Tu as couru dans la lice de la vie et tes pas ne t'ont pas trahi car ils ont glorieusement atteint le but; tu reçois maintenant le prix de ta course...»
Un autre termine ainsi son poème: « ...Que la bénediction de Dieu repose sur notre puissant intercesseur Sidi­Boumédine), et cela, tant que les oiseaux feront entendre dans le ciel leur langage harmonieux. »

La Qoubba. La Qoubba ou dort Sidi-Boumédine remonte aux dernières années du XIIème siècle. L'édifice fut remanié plusieurs fois, lors de la fondation de la Mosquée voisine, à l'époque turque et en 1793 après un incendie. C'est le type classique uniformément usité en Berbérie : cube couvert d'une coupole. Sur les quatre murs intérieurs; défoncements à arc outrepassé, et dans la partie supérieure de l'arcade, une fenêtre qu'ajoure un treillis en plâtre.
La décoration, de date récente, serait l'œuvre d'un artiste turc.

      

« Les parois, de la base au faîte, écrivait Brosselard en 1859, sont entièrement refouillées. C'est une étonnante profusion d'arabesques du style le plus pur le plus correct, le plus gracieux. » - Soyons franc :
Brosselard est indulgent: l'arabesque apparaît çà et là d'une verve facile, un peu grasse, sans spiritualité, Et les faïences du lambrissement, les carreaux du pavement accusent une facture italienne. Comme tous les marabouts dont le culte persiste, Sidi-Boumédine ne dédaigne pas la mode; ce grand mystique exige toujours l'arcade en fer à cheval; mais il tolère que ses fidèles demandent à la céramique d'Europe la décoration de son tombeau.


La mosquée de Sidi-Bournédine

Annexe de la Qoubba construite en 1339.
Le porche est prestigieux. Une grande arcade outrepassée, dépassant 7 mètres, large de 3, encadre la porté (fig. 50). Dans le rectangle qui la chevauche, s'entrelacent des arabesques en faïences blanches, brunes, vertes et jaunes, combinaisons diaprées de palmettes doublés symétriquement affrontées. Au-dessus, une bande de mosaïques déroule une inscription dédicatoire à hampes élancées: « Louange au Dieu unique ! L'érection de cette mosquée bénie a été ordonnée par notre maître, le Sultan serviteur de Dieu, Ali fils de notre seigneur le Sultan Abou Saïd Otman, fils de ....... etc... que Dieu le fortifie et lui accorde son secours - en l'année 739 (1339) », Dominant le ruban épigraphique, une frise de 5 rosaces dont le centre est une étoile octogonale et qui se joignent les unes aux autres, au moyen de chevrons disposés sur quatre bandes verticales. Un auvent à consoles géminées fait saillie sur l'ensemble. A environ 2 mètres du sol, les faces intérieures du porche sont sillonnées d'arabesques et d'inscriptions.

Une lourde porte en cèdre, à deux battants, revêtue de lames de bronze, sépare le vestibule de l'oratoire. Les thèmes décoratifs en sont les suivants: (a) - un polygone à 16 sommets d'où rayonne une grande rosace rectiligne. également à 16 sommets; (b) -- entre ce groupe géométrique et sa reproduction voisine dans le sens vertical, une petite rosace octogonale; (c) - des remplissages curvilignes et floraux; (d) - de gros clous en dômes cannelés; (e) -­enfin un heurtoir de bronze, de forme à peu près circulaire avec, à l'intérieur, une rosace à huit pointes sertie

 
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