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Notre empire colonial africain se compose de trois masses de
colonies, l'Afrique du Nord, l'Afrique Occidentale, l'Afrique Équatoriale,
que la nature a isolées les unes des autres. De plus, si la
première est, grâce à sa proximité, en relations étroites avec
la Métropole, les deux autres n'ont de rapport avec elle que par la
voie trop lente de l'Océan et leur arrière-pays est tributaire
jusqu'à leurs côtes de voies ferrées rares et de très médiocre
capacité.
Beaucoup a été fait déjà, par la T.S.F., l'automobile et l'avion
pour améliorer cette liaison; mais, quoi qu on ait dit, ces moyens
resteront, seraient-ils multipliés, insuffisants à l'assurer
parfaitement. Seul un chemin de fer « impérial » unissant
l'Algérie au Niger, le Niger au Tchad, le Tchad à l'Oubangui,
cimentera nos domaines épars et sera l'instrument définitif de
notre colonisation en Afrique.
En faveur de son utilité au point de vue militaire, faut-il
rappeler que le Conseil Supérieur de la Défense Nationale a jugé
qu'il était nécessaire pour nous apporter, en cas de guerre, dans
les meilleures conditions de sécurité et de rapidité, les
ressources du Centre-Afrique que la voie maritime de l'Océan ne
peut nous fournir sans grand danger et qu'avec parcimonie ? Et il ne
s'agit pas seulement de l'appoint de nos bataillons noirs dont on
n'a pas oublié l'aide précieuse; il faut surtout compter sur les
matières premières (oléagineux, coton, etc...) qu'utiliseraient
nos industries de guerre.
Les considérations qui précèdent devraient être tenues pour
suffisantes par une opinion publique soucieuse de l'unité de son
empire colonial et de la défense de son sol. Elles sont cependant
appuyées et renforcées par celles, qu'on fait valoir au point de
vue économique.
Le Niger est comparable au Nil par l'abondance de ses eaux et la
périodicité de ses crues. Le Soudan Français qu'il arrose sur
plus de 2.000 kilomètres de long en formant une large boucle, dont
le sommet touche aux confins du Sahara, n'attend plus que notre
intervention bienfaisante pour nous donner 60 millions d'hectares de
terres cultivées et devenir ainsi une nouvelle Égypte.
Les essais qui ont été tentés dans diverses stations pour
développer et améliorer l'élevage et certaines cultures
tropicales, le coton notamment, ont donné des résultats tout à
fait encourageants. Toutefois la mise en valeur du Soudan reste
subordonnée à plusieurs conditions. Il nous faudra |
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tout d"abord accomplir les grands travaux hydrauliques qui
régulariseront l'action des crues et permettront l'irrigation des contrées
sèches. Déjà dans ce sens le gouvernement a réalisé un des premiers
éléments d'un vaste programme, en faisant construire le barrage de Sotuba
que M. Maginot, ministre des Colonies, inaugurait au printemps de l'année
1929; et en ouvrant dans la région de Sansanding, sous la haute direction de
M. Belime, de vastes chantiers de travaux qui rendront au Macina son ancienne
prospérité.
Il faudra en même temps résoudre le problème de la main-d'œuvre, problème
grave qui se pose également avec acuité dans nos autres colonies de
l'Afrique Occidentale et de l'Afrique Équatoriale. Pour ne parler que du
bassin du Niger, on a établi que ce territoire de 2.500.000 kilomètres, ne
comptait pas plus de 5 millions d'indigènes, population très clairsemée
dans laquelle la mortalité infantile et la maladie font des ravages
considérables. Aura-t-on dans dix ans, dans vingt ans la main-d'œuvre voulue
pour assurer l'exploitation de cultures aussi étendues ? Le mal n'est pas
sans remède. Une vigilante politique sanitaire, dont on a déjà constaté
les résultats bienfaisants dans quelques centres d'essais, doit enrayer la
mortalité et accroître la population. M'ais ce n'est pas tout; l'indigène
produit à peine ce dont il a besoin pour vivre au jour le jour et ses besoins
sont infimes. Si l'on veut obtenir de lui un travail qui rapporte, il faut
s'efforcer par des mesures appropriées de le fixer à la terre comme un colon
et lui inspirer l'amour de la propriété et l'esprit de prévoyance.
Au reste les ouvriers agricoles algériens pourront fournir un appoint
considérable à la main-d'œuvre soudanaise. Il se trouve en effet que la
période active des cultures soudanaises correspond à ' une suspension des
travaux agricoles dans le Tell algérien et vice-versa. Le transsaharien
transportera chaque année vers le Niger un important contingent de chômeurs
algériens. Et plus tard lorsque la main-d'œuvre sera reconstituée, il
amènera en Algérie chaque année des chômeurs soudanais.
Le Colonel Abadie qui connaît mieux que personne les possibilités
économiques du bassin du Niger, a dressé un inventaire des productions
agricoles et pastorales que le Soudan serait en mesure de fournir dix ans
après l'ouverture du transsaharien, lorsque seront réalisées les conditions
indispensables à sa mise en valeur; on y cultivera sur des milliers
d'hectares le mil, les arachides, le riz; le coton et
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