Au sud, l'Algérie n'a pas non plus de frontière, ou plutôt, sa frontière s'est déplacée progressivement au fur et à mesure que s'est affirmée la pénétration dans le désert. Au temps de la conquête, la limite nord du Sahara pouvait être considérée comme la frontière de l'Algérie. Mais cette frontière purement fictive était constamment franchie par les tribus nomades, par les caravanes assurant le trafic commercial indigène entre les régions côtières et le Centre africain; elle l'était également par les éléments indigènes hostiles qui, périodiquement, venaient jeter le trouble dans l'activité de nos colons. Ce désert ne pouvait pas rester impénétrable à nos forces de police, ni à notre effort de civilisation. A l'heure présente, il n'y a pour ainsi dire plus de solution de continuité entre la limite sud de l'Algérie et la limite nord de nos possessions du Centre africain comme les rivières descendues de l'Atlas saharien, la frontière sud se perd dans les sables du désert et les chars de Leclerc en ont définitivement effacé les traces.

Telles sont, dans leurs grandes lignes, les caractéristiques du territoire algérien. A moins de se borner à suivre la côte, on ne peut visiter l'Algérie sans passer successivement d'une zone à l'autre par les routes naturelles qui les unissent et c'est là précisément le grand attrait de l'Algérie au point de vue touristique : on va, en quelques heures, des jardins enchantés et des villes populeuses de la zone côtière aux immensités désertiques du Sahara mystérieux.

M'Sila. - Vue générale.

C'est ce que nous allons faire, en entreprenant, au départ d'Alger, deux longues randonnées qui nous feront pénétrer en plein cœur du désert et nous ramèneront à notre point de départ en visitant, tout d'abord, la partie ouest de l'Algérie, puis sa partie est. Nous ne nous occuperons pas des moyens de transport ni de la durée des trajets. Tous les déplacements sont actuellement possibles en Algérie, où tous les modes de locomotion sont utilisés, du chameau à l'avion; le jour où nous pourrons effectivement faire ce beau voyage, il sera temps de consulter les horaires et de régler les étapes. Contentons-nous aujourd'hui de ce voyage en chambre, non sans rendre hommage à ceux à qui nous devons de pouvoir pousser si avant au cœur de la terre africaine: les chefs d'expéditions militaires qui ont, héroïquement, patiemment et l'on peut ajouter, pacifiquement, soumis les confins et le Sahara lui-même, dans toute son étendue; à l'influence française et les hardis pionniers du tourisme qui, comme Citroën lançant à travers le Sahara en 1927 l'audacieuse Croisière Noire, ont démontré la possibilité d'unir la côte algérienne au Centre africain en substituant au chameau l'automobile, en attendant que, demain, le rail réunisse la Méditerranée au Niger.

Bou-Saâda.- L'oued et le pavillon du peintre Dinet.