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LIVRE PREMIER |
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LES ORIGINES DE L' ART ARABE |
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LES PREMIERS KHALIFES |
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I. - L'ARABIE A L' APPARITION DE L'
ISLAM |
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Lorsqu'en l'an 620 de notre ère,
Mahomet se proclamait Prophète et prêchait pour la première
fois le Koran dans sa ville natale, l'Arabie n'était guère
encore qu'une agglomération de tribus pour la plupart
errantes, qu'une sorte de répulsion native semblait devoir
éloigner de l'art pour toujours.
Cette répulsion s'était traduite en une légende transmise,
de génération en génération à travers les âges qui
montrait les peuples d'Ad et de Tamoud - les Assyriens et les
Babyloniens - comme des hommes forts qui avaient tiré vanité
de leurs constructions colossales, et qui, vainement rappelés
à l'humilité par le vieux prophète Houd, avaient été
anéantis en un jour de colère par le Seigneur. Pareil
châtiment n'était certes pas à redouter pour l'Arabie.
Habitée par deux races, les peuples de l'argile et les
peuples du feutre, ses villes ne se composaient que de cabanes
de roseaux et de boue, ses villages que de tentes
disséminées sur le désert, son sanctuaire que d'un édicule
long et large de quelques pieds à peine. |
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Autour d'elle par contre, l'élan du mysticisme chrétien
parvenu à son paroxysme venait de renouveler l'art de la haute
Syrie et de l'Égypte; et si a des murs de Constantin la grandeur
était éclipsée ", selon le mot si plaisamment mis par
Monsieur de Voltaire dans la bouche de l'Apôtre transformé par
lui en rhéteur, du moins l'école byzantine, qui sous Justinien
venait de bâtir Sainte-Sophie, était-elle encore en état de
soutenir son ancien renom.
A l'est, la Perse, quoique demeurée en dehors du mouvement
chrétien, avait vu son art renaître, lui aussi, en partie avec le
règne de Kosroës. Constructeur autant que destructeur, le
conquérant avait semé de ses monuments les pays qu'il avait
dévastés. A soixante kilomètres de l'embouchure du Jourdain,
dans la mer Morte, il venait d'élever cet étonnant palais de
Machita, qui, perdu en plein désert judaïque tel qu'un
caravansérail immense, ne devait que lui servir d'abri lorsque,
traversant cette région désolée avec son innombrable escorte et
les trois mille femmes de son harem, il était contraint de s'y
arrêter.
Mahomet se doutait-il de tout cela? La chose est infiniment peu
probable, et l'ardeur de la lutte que dès le premier jour il eut
à soutenir ne lui laissa pas le temps d'y penser.
Tout d'abord accueillie avec enthousiasme, sa doctrine trouve
bientôt, dans la tribu des Koreïschites, - sa propre tribu, - des
adversaires résolus prêts à la résistance la plus opiniâtre.
Chassé de la Mekke par eux, il se réfugie à Médine et date du
jour de sa fuite (vendredi 16 juillet 622) l'ère de sa réforme.
Mais bientôt, ceux-là mêmes qui s'étaient montrés ses plus
implacables ennemis deviennent ses plus fervents adeptes. L'an 2,
il remporte sur ses derniers adversaires la victoire de Bedr; l'an
8, rentre triomphant à la Mekke, aux acclamations de ses anciens
proscripteurs ; puis, le Hedjaz et le Yémen se rendent; et du
coup, l'empire des khalifes se trouve définitivement fondé. |
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